Republié depuis mon blog : “Nous sommes requis”
Mon premier ressenti après les résultats (prévisibles) des régionales c'était de la déception, bien évidemment. C'est toujours attristant (et inquiétant) de voir le FN gagner en popularité. Les français ne croient plus aux promesses de nos deux partis historiques (et ils ont raison). Le pays s'enfonce dans la crise depuis des années, et les actions catastrophiques de nos dirigeants ont poussé une partie de la population vers le vote FN. Le résultat étant que le vote FN est devenu un vote assumé. Mais surtout, le FN représente aux yeux de beaucoup de français la seule et unique opposition politique. Le FN est ancré dans le paysage politique français dorénavant. C'est une des conséquences d'un bipartisme qui n'aura produit que des désillusions et des déceptions. Des abus de pouvoirs à répétition et des affaires de corruptions touchant tous les partis. Les premiers fautifs de ces résultats sont bien sûr nos dirigeants.
Mais peut on vraiment tenir uniquement nos politiciens comme responsables de ce fiasco?
Nos politiciens, après tout, agissent car on les laisse agir en toute impunité. On les laisse agir dans une indifférence générale. La seule réelle limitation du pouvoir de nos dirigeants résulte de la volonté et de la capacité du peuple à s'unir afin d'infléchir la politique du gouvernement. Aucun homme politique limitera volontairement ses pouvoirs . Aucun homme politique agit pour le peuple de manière spontanée et sans y être obligé. Le politicien n'est pas altruiste. Il est opportuniste (il suffit de voir comment nos dirigeants ont cyniquement profité des attentats de Paris pour mieux renforcer leurs pouvoirs et détruire certaines de nos libertés publiques).
Nous sommes dans une ère ou le désengagement de la société civile est de plus en plus élevé. Lorsque l'on constate le taux d'abstention hier, ce n'est pas étonnant que notre classe politique ne propose plus rien. Quand le peuple se désengage de la politique, les politiciens se désengagent du peuple. Donnant-donnant. Plusieurs raisons sont à l'origine de ce désengagement. Mais à mes yeux une des raisons principales étant le manque d'information qualitative à la portée des citoyens. Quantitativement parlant, on ne manque pas d'information bien sûr. Au contraire, on est bombardé d'information : à la TV, sur internet, à la radio, sur nos téléphones, etc... Mais quelle information? Celle qui est délivrée par des médias détenus par une poignée d'hommes d'affaires français (et pas que) richissimes? Celle qui est délivrée par nos médias dominants, ceux là-mêmes qui, à longueur d'année, choisissent d'éviter des sujets fâcheux car le pouvoir de l'argent en décide ainsi? Ceux qui alimentent le discours de haine durant toute l'année et qui derrière viennent faire semblant de se demander qu'est ce qui a poussé les français à majoritairement voter pour le FN?
Tous ces médias soutiennent le véritable pouvoir en place : celui de l'argent, celui du capital. Un capitalisme rampant, tentaculaire, qui ne connait aucune limite, même pas celle de l'environnement. Nos médias soutiennent le statu quo, car ce sont les premiers gagnants de cette loterie. Ils acceptent, participent, et mettent en avant un système qui est le résultat d'une société extrêmement inégalitaire. Une lutte des classes qui ne s'est jamais arrêtée. Elle est toujours là, en bruit de fond, invisible si on ne veut pas la dénoncer. Nos médias sont d'ailleurs en partie là pour nous faire oublier cette lutte des classes. On nous parle de terrorisme à longueur de journée, mais il ne faut pas se tromper d'ennemi, le terrorisme c'est peanuts comparé aux dégâts que causent nos politiques d'austérité et le néolibéralisme pratiqué depuis des années par nos gouvernements successifs, qu'ils se proclament de gauche ou de droite.
Je ne prétends pas à travers ce billet donner des solutions qui pourraient tout résoudre et faire de notre société un havre de paix et de cohésion sociale, loin de là. Il y'a beaucoup trop de points à aborder, les problèmes, et les solutions sont bien plus complexes et ne peuvent être abordées à travers un coup de gueule. C'est d'ailleurs pour cela, en partie, que j'ai décidé de lancer ce blog : afin de partager mes lectures, celles que j'estime apporter des solutions, des analyses pertinentes, des regards différents, etc...
Pour en revenir à mon point initial : les régionales d'hier et leurs sombres prédictions pour notre démocratie. Tout n'est pas perdu, au contraire. Ce qui ressort des élections d'hier c'est surtout le fort taux d'abstention. Pourquoi? Car la majorité des gens ne s'intéressent plus aux affaires du pays. Ils ne s'informent pas ou peu. Ils sont préoccupés par leur situation économique en déclin et n'ont plus le temps ou l'envie de se consacrer à lire l'information. Et lorsqu'ils décident tout de même de s'informer, c'est majoritairement à travers des médias qui ont abandonné leur traditionnel rôle de chiens de garde de la démocratie.
C'est pourquoi il est absolument indispensable de nous réapproprier notre droit à l'information. Un droit qui nous a été volé par le pouvoir de l'argent (bien aidé par un désengagement de l'Etat en matière d'aides à la presse).
S'informer c'est s'éduquer. Une population éduquée ne peut pas être trompée aussi facilement par ses dirigeants. Une population éduquée ne tombera pas aussi facilement dans les pièges populistes tendus par nos politiciens, qui ne sont en réalité que les représentants d'une classe économique dominante. Une population éduquée ne se refermera pas sur elle-même, devenant ainsi proie à ses peurs et ses incertitudes. Une population éduquée exigera inévitablement plus de transparence de la part de nos dirigeants. Un engagement populaire et une société civile vibrante ne peut exister que si elle est réellement éduquée. Une partie de cette éducation passe à travers des médias indépendants.
Pour permettre à nos médias d'être réellement indépendants, et à nos citoyens d'être réellement éduqués, participez, donnez, abonnez vous. Ça sera déjà un excellent début. Et vous en serez les premiers récompensés.
Où donner? Chez qui s'abonner? Petite liste, non exhaustive : Mediapart,Arrêts sur images, Le Monde diplomatique, Bastamag,Reporterre, Acrimed, OrientXXI... ( pour d'autres sources d'informations de qualité, vous pouvez consulter le nouveau portail lancé par Bastmag).
Comme le rappelle Edwy Plenel dans la vidéo qui suit : nous sommes requis. Nous sommes tous requis.