À consulter ici également : “L’accaparement des richesses se double maintenant d’un accaparement du politique”
« En 2015, 62 personnes possédaient à elles seules les mêmes richesses que 3,5 milliards de personnes (soit la moitié la plus pauvre de l'humanité), contre 388 personnes en 2010 », rappelle le dernier rapport Oxfam sur les inégalités, publié le 18 janvier. Ces 62 milliardaires ont vu leur fortune augmenter à la vitesse de la lumière : + 44 % entre 2010 et 2015, soit une hausse de 542 milliards de dollars. Leur fortune cumulée représente désormais 1 760 milliards de dollars. Dans le même temps, « les richesses de la moitié la plus pauvre de l'humanité ont diminué de plus de mille milliards de dollars au cours de la même période, soit une chute de 41 % », souligne Oxfam.
Ce 1 % constitue désormais un monde à part. Il a ses conseils, ses avocats, ses gestionnaires de fortune. Toute une industrie fiscale, comptable, juridique s’est organisée autour d’eux pour les aider à recycler les fortunes dans les paradis fiscaux, à échapper par tous les moyens à l’impôt, à ne pas participer à l’intérêt général. D’après les estimations de l’économiste Gabriel Zucman, 7 600 milliards de dollars sont détenus sur des comptes offshores par des particuliers. Parmi les mesures à prendre, Oxfam estime qu’il est urgent d’en finir avec les paradis fiscaux et d’élaborer une harmonisation de la fiscalité au niveau mondial pour les multinationales.
Si les riches veillent avec un soin particulier à ne pas être mis à contribution par la société, ils sont tout aussi attentifs à se tenir très près du pouvoir. L’accaparement des richesses se double maintenant d’un accaparement du politique. Par tous les moyens, ils cherchent à influencer la loi, les textes, les décisions en leur faveur, dans leur seul intérêt. Les sommes investies par les groupes sont gigantesques pour obtenir la bonne décision : plus de 400 millions de dollars pour le secteur financier, plus de 200 millions de dollars pour l’industrie pharmaceutique sont dépensés chaque année en action de lobbying rien qu’aux États-Unis.
« La concentration du pouvoir économique ne fait que servir davantage les intérêts de ces mêmes secteurs d'activité, entreprises et particuliers, en créant un cercle vicieux et injuste qui pérennise et renforce le contrôle des marchés et des ressources économiques par une élite au détriment d'autrui », accuse Oxfam qui dénonce une économie au service des 1 %.Ceux-ci obtiennent des pouvoirs économiques, des passe-droits, des fortunes sans rapport avec leur mérite. « Il n’est pas toujours nécessaire de procéder à de lourds investissements en matière de travail, d’efforts et de créativité pour obtenir des retours lucratifs et se hisser à une position de puissance et d'avantage économique. En fait, il arrive que la création de revenus et de richesses soit presque intégralement déconnectée de toute productivité ou valeur ajoutée », insiste l’ONG.