Une décennie de législation pour faire évoluer l’isolement-contention
Les mesures qui encadrent l’usage de la contention et de l’isolement ne sont pas toujours allées de soi. Elles sont le résultat d’une décennie d’avancées juridiques entamées par Nicolas Sarkozy.
En 2008, un patient échappé d’un service psychiatrique poignarde un jeune homme à Grenoble. En réaction, l’ancien président de la République promet une « réforme en profondeur » de l'hospitalisation, dans l'objectif de sécuriser la psychiatrie. Menée par Roselyne Bachelot, cette promesse aboutit à la loi du 5 juillet 2011, qui impose un cadre plus strict autour des soins psychiatriques sans consentement : une entrée dans les soins facilitée grâce à la procédure de péril imminent (SPI) ; la mise en œuvre d'une période d'observation « légale » permettant de s'assurer que le patient bénéficie de soins adaptés à son état de santé ; le contrôle systématique du respect du processus par le juge des libertés et de la détention (JLD).
Borner le temps d’isolement
En 2016, le ministère de la Santé sous la direction de Marisol Touraine reprend les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS), et réglemente la pratique de l'isolement. Elle doit désormais s’effectuer dans un lieu dédié, en dernier recours, sur décision d'un psychiatre, pour une durée limitée. L'obligation de tenir un registre des contentions et des isolements est instaurée.
Alerté sur la question de l'isolement, le parquet de Versailles pose en juin 2020 une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur la position du juge vis-à-vis de l'isolement. Validée par le Conseil constitutionnel, elle force le gouvernement à introduire l'article 84 dans le Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2021, qui spécifie que l'isolement ne peut se faire que dans les cas d’hospitalisation sous contrainte. Cette loi oblige aussi les hôpitaux psychiatriques à prévenir le juge des libertés et de la détention au bout de 24 heures en cas d’isolement ou de contention et demande au psychiatre de motiver sa décision. Elle borne également le temps d’isolement : celui-ci est décrété pour une durée maximale de 12 heures et peut être renouvelé jusqu'à 48 heures consécutives. La contention est décrétée pour une durée maximale de six heures, et renouvelée jusqu'à 24 heures maximum.
En 2021, le parquet de Versailles pose une nouvelle QPC, validée par le Conseil constitutionnel, qui porte sur le recours non systématique au JLD dès la décision de placement en chambre d’isolement. Le gouvernement devra de nouveau légiférer sur le sujet d'ici la fin de l'année 2021.
CGLPL=Contrôleuse Générale des Lieux de Privation de Liberté
CDHP = Commission Départementale des Hospitalisations en Psychiatrie