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Billet de blog 28 mai 2025

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L'Educ Pop, rempart contre le RN

Changer le vote de certains électeurs tentés par le RN, les associations d'Education Populaire et les centres sociaux le peuvent. Grâce à leurs actions quotidiennes, elles démontrent que l'autre n'est pas un ennemi et que les paroles politiques ne sont pas souvent suivies des actes. Ces structures socioculturelles se meurent dans l'indifférence. Commençons par les soutenir et agir avec elles.

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RN : qu'est ce qu'on fait ?

Statistiques, études diverses et variées, articles, livres de sociologues, on sait tout du Rassemblement National et de ses électeurs. 

Discours politiques, jugements de valeur, injures, plus les réactions se multiplient et plus le RN progresse.

Alors, qu'est ce qu'on fait ?

Je pars du principe que tous ses électeurs potentiels ne sont pas définitivement acquis au RN. Certains sont séduits par un discours qui leurs semble avoir du bon sens et correspondre à tout ce qu'on entend sur les médias. Des médias essentiellement tenus par quelques milliardaires, comme V. Bolloré ou P.E. Stérin qui souhaitent l'extrême droite au pouvoir demain. Des médias et des politiques qui nous montrent du doigt les plus faibles, les plus différents comme la cause des malheurs de chacun. On sait qu'il est difficile de lutter contre ces discours démagogiques, répétés chaque jour, qui se servent du moindre fait divers pour alimenter la suspicion de l'étranger, du différent, de l'autre, du 'pas comme nous'. 

Or il existe des structures associatives qui agissent quotidiennement et efficacement contre le repli sur soi, contre la méfiance à l'égard de l'autre, contre les préjugés.

Dans ces structures, pas d'étiquettes, pas de jugements, pas de stigmatisation ou de discrimination, tout le monde est le bienvenu et tout le monde y vient pour des raisons diverses. Certains pour pratiquer une activité culturelle ou sportive, d'autres pour agir sur la consommation au sein d'une AMAP, d'autres encore pour faire du soutien scolaire, pour apprendre le français ou des langues étrangères, pour débattre après une conférence, un spectacle vivant ou un film, pour recevoir de l'aide à la parentalité, ou juste pour passer un bon moment autour d'un jeu de société, d'une boisson sans alcool, d'un repas partagé, d'une sortie en montagne, d'une excursion. 

Ces lieux de rencontres, d'échanges, espaces chaleureux dédiés au vivre ensemble dans lesquels chacun apporte ses connaissances, ses savoir-faire, sa culture, et découvre celles de l'autre, du voisin, du différent, il y en a partout sur le territoire. Ou du moins il y en avait partout. Maison des Jeunes et de la Culture, Centres sociaux, Maisons de quartier, Comités des fêtes et associations diverses, elles réunissent des gens d'opinions, d'expériences de vie, d'histoires, de pensées, de croyances, d'idéaux, de rêves, toutes et tous très différents. Elles se déplacent dans les quartiers, au pied des immeubles, provoquent le débat en offrant un café.

Quand toute cette population se rencontre, se percute, s'oppose, les professionnels de ces structures savent ouvrir le dialogue, moduler la confrontation, faciliter la découverte de la diversité, redonner le pouvoir d'agir aux habitants. Non, tout le monde n'est pas comme moi et chacun est légitime dans son itinéraire personnel, dès lors qu'il ne perturbe pas violemment celui d'un autre. Dès lors que tout le système ne nous fait pas croire qu'un seul monde est possible.

Sans violence, sans jugement, avec respect et curiosité, on parle autour d'un plat inconnu dont on partage la recette, devant un musicien qu'on n'avait jamais entendu, après une conférence qui a réveillé des souvenirs, conforté ou invalidé nos certitudes. Chacun apporte ses idées, son savoir et en découvre d'autres, ou les remet en question. Là aussi, certains ne cachent pas leur sensibilité pour le RN, « parce qu'ils ont peut-être raison » et « qu'on n'a jamais essayé ». Pas vraiment racistes, juste un peu xénophobes à force qu'on leur rabâche les oreilles avec ce bouc-émissaire, mais surtout mal informés et en souffrance.

Et quand on écoute la souffrance, les barrières s'abaissent, les liens se créent, finalement tout n'est pas aussi manichéen qu'on veut bien nous le faire croire. Celui qui se sentait séduit par tel ou telle femme ou homme politique, se rend compte qu'il se trompait peut-être. Un doute, c'est un début.

Cette manière de vivre le collectif, cela s'appelle l'Education Populaire. Une éducation du peuple par le peuple. Des mises en situations pour mieux vivre ensemble.

Aucune statistique sur le changement que tout cela apportera dans l'isoloir, l'espoir que oui, souvent non quand les certitudes sont bien ancrées et que le dialogue est impossible. Mais même avec quelques-uns, les préjugés auront un peu été ébranlés, l'information sera passée, partagée et validée, le doute retrouvé.

Alors, sont-elles magiques les associations d'Education Populaire ? 

Ho ! rien de magique, juste du travail, de la réflexion et de l'engagement. Un engagement à accepter les différences, à écouter les histoires, à considérer l'autre comme une personne censée, d'où qu'elle vienne et où qu'elle en soit dans son parcours. Un engagement qui ne plaît pas à tout le monde car allant à l'encontre du vent qui souffle. Et ce vent là apporte avec lui son lot d'intolérance, de restrictions de subventions, de désaveux politiques, entraînant la fermeture de certaines de ces structures, parfois remplacées par des entreprises privées. S'ensuit la perte des adhérents, la perte d'engagement, le rejet et la mise à distance des corps intermédiaires, jusqu'à la liquidation de grandes fédérations régionales d’éducation populaire qui succombent dans un silence assourdissant. 

Les plus courageuses de ces associations encore actives, continuent coûte que coûte. Les autres, couteaux sous la gorge, essaient de faire le moins de vagues possibles pour contenir au mieux un budget qui permette de poursuivre leur action. C'est souvent qu'elles n'ont plus assez d'adhérents motivés pour faire le poids face à des collectivités locales légitimement élues mais qui agissent parfois brutalement, affichant leur toute puissance.

Alors qu'est-ce qu'on fait ? On suscite et alimente le débat public ? On s'engage ? On agit ? On reprend le chemin des urnes lors d’élections ? Vite ! parce que la structure du quartier qu'on regarde du coin de l'œil et dont on a jamais poussé la porte, risque de bientôt fermer. 

Et qu'est ce qu'on fera ? 

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