Préambule :
Et si on se posait la question autrement en se demandant pourquoi aujourd'hui plus qu'hier certaines personnes ne parviennent pas à trouver ce précieux sésame nécessaire à la reconnaissance sociale ?
Pour poser la question autrement, demandons-nous s'il n'y a pas une part de responsabilité qui serait liée à l'évolution de la société qui confond trop souvent travail, activité humaine et emploi. Cette entrée devrait nous amener à nous interroger sur le fait que des personnes pourtant peu favorisées pouvaient jadis trouver une place reconnue dans la société alors qu'aujourd'hui une partie de ces personnes restent sur le bord de la route sans solution.
Pour donner quelques éléments de contexte, je souhaite préciser que de projet d'article me trottait déjà dans le tête depuis quelques temps, mais il restait à l'état de brouillon, deux initiatives m'ont donné envie de le mettre en forme et de le publier ; voici ces deux sujets de motivation :
- la publication d'un tweet invitant à signer une pétition dans laquelle l'auteur présente des situations très concrètes montrant le vécu difficile de personnes bénéficiant du RSA et qui sont tout, sauf des assistés ,
- l'article de @faizaz paru ce matin sur Médiapart sous le titre : "Les failles béantes de la réforme du RSA".
La société a changé : une approche qui conduit à formuler au moins deux hypothèses :
- Y a-t-il une égalité de chances dans la capacité à s'intégrer dans le monde du travail ? Auquel cas, est-il devenu plus difficile aujourd'hui d'y parvenir ? N'y a-t-il pas comme une forme de "handicap" qui peut rendre très difficile une intégration dans le monde du travail pour certaines personnes et si c'est le cas faut-il sanctionner celui ou celle qui souffre déjà de cette situation handicapante ?
- Notre modèle de société ne se caractérise-t-il pas par un problème de reconnaissance purement économique de l'activité humaine qui a pour effet d'écarter d'office une part conséquente de cette activité humaine parce que cette société considère tout simplement que ce travail ne vaut rien en terme de valeur financière à court terme alors qu'il est pourtant essentiel pour le fonctionnement de cette même société ? Cela conduit à considérer que toute aide devient alors une charge à supporter et qu'on s'efforce de vouloir effacer.
La deuxième hypothèse ne doit-elle pas nous amener à constater que ces activités étaient autant de situations d’intégration possible il y a quelques dizaines d’années alors qu’aujourd’hui, le fait qu’elles ne sont plus reconnues socialement elles ont pour effet d’écarter de l’emploi des personnes qui autrefois avaient un vrai métier et un rôle social valorisant. Par extension, on peut aussi se pencher sur la chute de la reconnaissance de certaines missions dans lesquelles les métiers ont été tellement dégradés qu'ils n'attirent plus assez de candidats (exemples : éducation, santé...).
Dans cette hypothèse la solution n’est-elle pas dans la reconnaissance de ces activités (donc du travail qu’elles représentent) comme de vrais emplois au service de la société. Certes, cette piste sera très probablement perçue comme une utopie par le capitalisme trop centré sur la recherche de profits, mais elle constitue certainement une piste sérieuse si on considère que l’humain doit rester l’entrée principale pour se projeter dans la construction de la société et il y a là une belle porte d’entrée pour distinguer ce qui peut différencier une politique de droite d’une politique de gauche.
Conclusion :
Dit autrement, nous sommes confrontés à deux visions de la société à construire : la première s'inscrit dans une perspective libérale qui ne conçoit son développement qu'en demandant à l'homme de s'adapter aux besoins d'une société axée très prioritairement sur l'économie et la recherche de rentabilité et même bien plus, de croissance et de profit. La deuxième vise une entrée centrée sur les besoins humains qui suppose que l'on adapte la société afin qu'elle puisse répondre aux besoins des humains... de tous les humains. Il n'est donc pas surprenant que dans cette logique la première vision conduit à une forme d'asservissement au service d'un projet de société qui profite aux plus performants et aux plus influents (ou privilégiés) et qui pénalise lourdement les plus fragiles au point que certains en soient réduits à la marginalisation. Le moteur de la deuxième vision s'appuie sur un projet d'émancipation qui prend son énergie dans la perception d'une existence reconnue, d'un sentiment d'utilité qui fait sens et de la volonté de prendre toute sa place dans un projet collectif.