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Billet de blog 29 avril 2022

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Législatives : répondre aux attentes des électeurs avant tout !

Nous sommes dans une période décisive entre l'élection présidentielle et les prochaines élections législatives. Cette période est propice à l'envie de partager quelques éléments d'analyse à travers cet article.

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Nous venons d’élire le président et il est maintenant question de renouveler l’assemblée nationale. Force est de constater que le contexte reste très compliqué et l’aboutissement plutôt imprévisible. Certaines tendances sont tenaces au point de constater que des travers admis pour lesquels globalement tout le monde voudrait sortir restent prégnants et sont autant d’obstacles au rassemblement pourtant nécessaire.

La fracture entre les citoyens et les politiques n’est toujours pas réparée :

Il apparaît que la fracture entre les leaders de partis et les citoyens reste une préoccupation persistante au grand dam de tous. On en a eu une première illustration avec la primaire populaire qui, bien qu’ayant été plébiscitée par les citoyens si l’on en juge le nombre des participants aux votes, a été boudée et même combattue par une majorité de leaders politiques de la gauche sociale, écologiste et solidaire. Le chacun pour soi et la sauvegarde de la boutique ont prévalu au point qu’on est passé à côté de l’intérêt collectif. Les résultats du premier tour confirment pourtant que, sans rassemblement, les conséquences sont catastrophiques. Les résultats de certaines formations ont été telles qu’ils les ont conduites à faire un appel aux dons pour certaines d’entre elles. Comme il fallait s’y attendre, sans rassemblement, la gauche sociale, solidaire et écologiste entérinait pourtant son incapacité à être présente au second tour ce qui fut le cas.

Un second tour dans la lignée du premier :

Pour la préparation du second tour de la présidentielle, la gauche écologiste, sociale et solidaire a continué à se déchirer… un peu comme si elle était incapable de tirer les leçons d’une expérience désastreuse pourtant encore toute chaude. À y regarder de plus près, ce sont les mêmes leviers qui ont été activés ; à savoir une guerre des chefs en quête de survie pour certains et qui par leur attitude se sont même coupés d’une partie de leurs propres militants. Ceci confirme les attentes fortes d’un rassemblement des citoyens qui peut laisser à penser que les gens de terrains sont beaucoup plus conscients de la réalité et de ses enjeux que les leaders de partis qui ne voient comme issue positive que le résultat de leur appareil, voire sans doute pour certains un résultat personnel. Cette attitude n’est pas sans interroger la compatibilité de ce comportement centré sur l’appareil et la personne avec le concept même de démocratie. Ces leaders peuvent-ils encore se dire représentants d’une formation quand ils agissent seuls et quand ils refusent de prendre en considération les attentes divergentes de leurs militants ? Cette question est de mon point de vue légitimée par des constats de terrain : contestation de la démarche du parti par des militants, perte de militants, énergie dépensée dans une lutte concurrentielle envers ceux et celles qui devraient être des partenaires… Ce constat s’est retrouvé confirmé en particulier chez Génération.s, EELV et PS...

Cette période a aussi été marquée par des attitudes surprenantes de la part de responsables qui se disent démocrates. Au risque de déplaire voici quelques remarques que j’avais envie de partager :

  • À propos des consignes de vote pour le second tour :

    • la situation méritait bien entendu que des voix s’élèvent à ce sujet, il y allait d’un choix de société dont en particulier la question de l’avenir de la liberté et ceci dans un contexte très difficile lié au vécu du quinquennat qui s’achève. Il ne s’agit donc pas ici de remettre en cause le fond sur lequel on est d’accord, à savoir tout faire pour préserver la démocratie en luttant contre l’extrême droite, mais cela n’exclut pas la nécessité de se positionner sur la forme. Doit-on considérer que les citoyens sont libres et conscients et respecter leur liberté de choix ou les considère-t-on comme incapables de choisir ce qui justifierait qu’on leur indique le choix qu’ils doivent faire ? Dans le premier cas, on peut bien évidemment argumenter et donner un avis et sur ce plan il est incontestable que la LFI a eu une posture tout à fait à la hauteur de ce qu’on pouvait espérer tout en alliant argumentation d’un point de vue éclairé et en respectant la liberté de chacun, dans la second cas, l’attitude renvoie à une perception du droit du citoyen qui interroge sur la conception que l’on a de la démocratie que l’on prétend pourtant défendre. Parmi les dérives, on peut évoquer l’utilisation de la culpabilisation pour imposer sa façon de voir les choses ; cette pratique qui s’appuie sur des émotions plus que sur des arguments respecte-t-elle la liberté de pensée, ou ne contribue-t-elle pas plutôt à faire pression sur des personnes qu’on jugerait incapables par elles-même de faire un « bon choix » ? Cette deuxième posture n’est-elle pas un facteur de fracture pour les personnes qui prennent conscience du manque de considération qu’on leur renvoie en utilisant cette façon de communiquer ? En ce sens cela ne peut que renforcer le sentiment d’incompréhension et d’exclusion alors qu’on devrait faire le contraire.

  • À propos des lynchages de militants pour leur prise de position :

    • cette période a aussi été marquée par l’expression d’avis discordants au sein des formations entraînant la mise à l’écart des voix divergentes où à leur prise de distance volontaire. Cette alerte pose la question de la gouvernance en situation de crise. Ne devrait-on pas prendre au sérieux l’expression de ces divergences au lieu de les réprimer, c’est d’autant plus questionnant que la division est à l’opposé du rassemblement souhaité et pour lequel on était sensé se mobiliser. En se projetant dans la fonction de la candidature à la présidence ne devrait-on pas aussi tirer un enseignement de l’attitude du candidat et de sa capacité à écouter et intégrer les points de vue divergents par rapport à sa capacité à garantir un engagement favorisant la cohésion d’une nation ?

  • Comment concilier rassemblement et pluralisme ?
    • La période a été l’occasion de voir le concept de « parti unique » refaire surface ; d’une part, l’insistance sur le « ni droite, ni gauche » tentant d’écarter (ou de démanteler) toutes les oppositions peut nous faire craindre ce risque pour la démocratie. Cette réflexion a bien entendu toute sa place dans l’analyse de ce que propose comme modèle de société la LREM, mais on gagnerait aussi à se poser la même question dans le contexte de rassemblement de la gauche sociale, écologiste et solidaire.

    • Sur ce plan, il serait pertinent d’approfondir ce qu’attendent les citoyens de ce rassemblement pour en avoir une connaissance plus précise, mais on peut supposer qu’ils n’imaginent pas une formation unique qui les représenterait, mais davantage un travail collectif de collaboration entre un ensemble de formations qui portent un idéal commun d’évolution de la société et qui sont en mesure de quo-construire un projet sans renier des différences de points de vue sur certains sujets. Dans ce domaine se pose aussi la question de l’écart qui peut exister entre les citoyens et les leaders de formation, mais une chose est sûre, le rassemblement ne se fera pas s’il n’est pas porté par une base tout comme il sera difficile à faire si les leaders n’entrent pas cette logique.

Bientôt les législatives :

La perception et prise en compte de paradoxes peut-elle être un levier pour faire bouger les choses ?

    • Il est sans doute difficile de répondre à cette question, mais on peut quand même l’espérer. Pour étayer ce propos, voici quelques pistes qui me viennent à l’esprit pour sortir de la situation d’impasse avant l’arrivée des législatives :

      • la lutte fratricide au seins des formations de la gauche écologiste, sociale et solidaire est un non sens et ne fait que rendre les obstacles au rassemblement de plus en plus infranchissables, il faut donc en sortir au plus vite, quitte à ce que cela vienne de la base des formations quand les leaders persistent dans une démarche contre-productive égocentrée1.

      • Les résultats du second tour nous donnent un bon aperçu de ce qu’attendent les citoyens qui espèrent que la gauche puisse jouer un rôle essentiel dans la gestion des 5 années à venir, il est donc clair que le projet le plus fédérateur pour répondre aux attentes des électeurs est celui de l’union populaire, c’est donc vers là et seulement vers cette direction qu’il faut converger.

      • Pour ne pas tomber dans le travers d’une dérive de parti unique, l’union populaire doit se faire en rassemblant des formations partenaires qui acceptent de relever le challenge ensemble, il ne s’agit pas de fusionner mais davantage d’installer une coopération de plusieurs formations (partis ou mouvements...). Il ne s’agit pas de gommer les spécificités, mais bien de les faire fructifier en les mettant au pot commun. C’est en ce sens que l’idée de créer une fédération des partis de gauche2 proposée par Jean-Luc Mélenchon va tout à fait dans le bon sens.

Un challenge à relever :

Nul ne peut prédire l’avenir, mais rien n’empêche d’y réfléchir et d’imaginer des scénarios prévisibles. Sur ce plan la cohésion nationale ne sera possible que si l’ensemble de la population se sent reconnue. C’est une condition qui ne sera pas facile à satisfaire tant la fracture est maintenant ancrée. C’est une raison essentielle pour laquelle il est impératif que la gauche sociale, solidaire et écologiste réussisse son pari en ayant une représentation forte à l’assemblée nationale. C’est une condition nécessaire pour que les citoyens dans leur ensemble et plus particulièrement les moins favorisés trouvent enfin des réponses satisfaisantes concrètes à leur attentes légitimes. C’est aussi une condition indispensable pour que l’espoir de voir enfin le politique retrouver du sens soit au rendez-vous au point de rétablir la confiance des citoyens envers les institutions. Si on ne parvient pas à le faire, ce sera encore plus de frustrations, plus d’écœurement et de rejet et on le sait bien, cela conduira encore davantage de personnes à déserter les urnes ou pire à se replier vers l’extrême droite qui n’apporte pourtant pas de solutions crédibles malgré son discours enjôleur de promesses et dont on connaît les dérives sociétales.

Pour conclure, on est devant une situation décisive à deux temps : le premier consiste à obtenir une bonne représentation à l’assemblée nationale pour être en mesure d’orienter l’action politique vers une société sociale, solidaire et écologiste qu’on pourrait peut-être résumer sous l’expression « société humaniste » ; le deuxième temps sera de mettre en pratique les promesses à travers des actions concrètes cette politique attendue pour le bien de tous.

1À prendre dans le sens centrée sur le parti ou centrée sur son leader.

2Voir l’article du Monde : https://www.lemonde.fr/politique/live/2022/04/28/legislatives-2022-en-direct-jean-luc-melenchon-appelle-a-une-federation-des-partis-de-gauche_6123992_823448.html

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