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Billet de blog 5 décembre 2012

Rose & Compagnie Esa / Rose des Vents Pour une expérience du théâtre

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Rose & Compagnie

Esa / Rose des Vents

Pour une expérience du théâtre

> du 6 au 19 décembre 2012

Vernissage le jeudi 6 décembre de 17h00 à 20H00

Maison du gardien

Esa - Site de Tourcoing

36 bis rue des Ursulines

 Les étudiants de deuxième année de l’Ecole Supérieure d’Art du Nord-Pas de Calais, site de Tourcoing, présentent Rose & Compagnie, une exposition qui résulte d’une expérience singulière du théâtre contemporain.

Durant le premier semestre 2012, dans le cadre de l’enseignement de Culture Générale, ils ont assisté à trois représentations : Please kill me, A brief history of hell et Les cornes du diable, trois pièces programmées par la Rose des Vents, scène nationale de Lille Métropole, un théâtre qui dans sa définition même met l'accent sur la recherche de nouvelles écritures dramatiques et scéniques et sur l'émergence des formes nouvelles et des jeunes générations d'artistes.

A partir de ces trois pieces, auxquelles s’est ajoutées plusieurs rencontres avec acteurs et metteurs en scène, et après quelques discussions préparatoires avec Anna Gerecht, chargée des publics à la Rose des Vents et responsable du choix des pièces, il nous a paru évident qu’il ne s’agirait pas seulement d’assister passivement à des spectacles.  Il leur a donc été demandé de réaliser une production plastique, aujourd’hui présentée dans la Maison du gardien.

Photographies, dessins, installations, réalisations sonores, performances, vidéos : il est surprenant de voir la diversité des formes plastiques prise par leur interprétation et la capacité qu’ils ont eu à investir l’ensemble des espaces de ce vaste endroit. Car il ne s’agit pas de conventionnels et pâles reportages photo à partir des pièces, les photographies étant dans la majorité des cas interdites pendant le spectacle. Face aux pièces, ils ont du ouvrir au maximum le champ des interrogations pour mettre en œuvre leur propre perception. Ils ont du se demander s’il convenait de se saisir d’un fragment du spectacle ou tenter de l’englober dans son ensemble. Certains se sont essayés à fixer leur attention sur un de leur sens, la dimension auditive par exemple, en fermant les yeux pour ne plus qu’entendre le spectacle et capter ses sonorités. D’autres ont porté leur attention sur le texte, les dialogues, ou bien s’en sont dessaisis pour n’observer que la mise en scène, le décor ou le non décor, le plateau nu, et les mouvements des acteurs.

Si la première pièce à laquelle ils ont assisté, Please kill me, qui traite de l’héritage du Punk, a été majoritairement retenue, les résultats plastiques n’en demeurent pas moins très personnels. La pièce intitulée A brief history of hell fut également retenue en ce qu’elle mettait en scène des acteurs de l’art contemporain sous des aspects caricaturaux mais bien réels : le commerce des œuvres et l’importance de la spéculation. Ainsi dans l’exposition se retrouvent étrangement mêlés le Punk et l’art contemporain, les ventes aux enchères d’œuvres au prix exorbitants sur les derniers accords romantico dépressifs de l’histoire du Punk des années 60 et 70.  

Au tout début du premier semestre, alors que nous n’avions pas encore assisté à une pièce, et que les résultats plastiques étaient pour moi une véritable inconnue, je leur avais parlé des propos historiques de John Cage : « Le théâtre réside dans l’esprit du spectateur ; je m’efforce de faire prendre conscience aux gens qu’ils font eux-mêmes leur propre expérience et que celle-ci ne leur est pas imposée. » J’avais aussi à l’esprit le texte de Rancière, Le Spectateur émancipé qui disait : « Le spectateur observe, sélectionne, compare, interprète. Il lie ce qu’il voit à bien d’autres choses qu’il a vu sur d’autres scènes, en d’autres sortes de lieux. Il compose son propre poème avec les éléments du poème en face de lui. »[1]

Cette exposition montre que les étudiants ont en effet lié ce qu’ils ont vu à bien d’autres choses, qu’ils ont en outre entièrement assimilé les concepts d’interdisciplinarité qui caractérisent les scènes plastiques et théâtrales. Rose & Compagnie témoigne surtout de leur capacité à inventer des formes plastiques qui sont le fruit de leur expérience du théâtre.

Nathalie Stefanov

Professeur d’enseignement artistique, Esa, Tourcoing.


[1] Jacques Rancière, Le spectateur émancipé, La Fabrique éditions, Paris, 2008, p.19

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