Eugène Rougon

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C'était l'année dernière au Festival de La Roche que l'on a pu découvrir Le jour de la grenouille de Béatrice Pollet.

Une province sans âge ni charme estampillé, un site archéologique, un accident, une mère alcoolique, une jeune chercheuse têtue résistant d'abord de toutes ses forces contre l'attrait qu'exerce sur elle le chercheur réputé envoyé pour superviser, voire juger, son travail : rien ne reconduit le film de Béatrice Pollet à l'ordinaire de ce qu'est un premier long métrage, aujourd'hui, dans le cinéma français. Sa puissance loge ailleurs que dans la chronique, la romance, le passage à l'âge adulte, bien que tout cela y soit aussi. Elle loge dans une certaine manière d'avancer à pas feutrés, dans l'invention de ce qu'il faut nommer la poésie. Celle du montage, d'abord et surtout, qui fait passer de l'air au sous-sol, d'aujourd'hui à hier, d'hier à avant-hier, de la tristesse à l'amour, par la grâce d'une rime visuelle ou sonore, d'un voile, d'un tissu, d'un souffle. Aucun signe d'époque, ni dans le jeu ou la beauté de l'actrice principale, Joséphine de Meaux, ni dans le décor ou l'ambiance : Le jour de la grenouille tombe quand il veut, sans date. L'amour lui-même, d'abord improbable, irresistible ensuite, entre Anna et Peter - Patrick Catalifo, qui trouve ici son meilleur rôle - devient une possibilité ou une réserve du temps, quelque chose qu'il faut désenfouir avec mille précautions, au risque qu'à peine ramené à l'air libre il retombe en poussière.

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Le jour de la grenouille © Béatrice Pollet

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