Eugène Rougon

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Illustration 1
Quality Control © Kevin Jerome Everson

Quality Control de Kevin Jerome Everson était dans la compétition internationale du Festival de La Roche en 2011, en première française.

Le public français connaît encore mal Kevin Jerome Everson, sculpteur, photographe, cinéaste noir américain né en 1965 à Mansfield dans l’Ohio et occupé depuis vingt ans au moins à une seule tâche : filmer, ce sont ses mots, « les matériaux quotidiens, la condition, les tâches et les gestes » du peuple noir américain ; filmer cela comme un artisanat, un art, une œuvre. Everson a déjà réalisé près de soixante-dix courts métrages et quelques long métrages. Quality Control est le cinquième. Il ne fait pas exception à la règle : une fois entré dans les salles d’un grand pressing industriel de l’Alabama, le spectateur n’en sortira plus. Il en aura vu les employés, tous noirs, repasser, plier, repriser à l’occasion. Il les aura entendus parler, rire, râler à l’occasion. Des écrans noirs, signature d’Everson, auront par intermittence suspendu le flux d’une image elle-même en noir et blanc. Quality Control dure à peine plus d’une heure. Les gestes s’y répètent, les heures passent, les uns comme les autres toujours égaux. Pourquoi alors touche-t-on à la féerie ? Pouquoi la surface de l’image vibre-t-elle ainsi ? C’est que le travail est double, chez Everson, dans ce film comme dans les autres, à la fois sujétion et manière de devenir-sujet. Intermittence de l’obscur et du clair. Il est ce qui documente une condition sociale, une dureté d’existence. Mais il est ce par quoi un peuple se donne à voir, conquiert une visibilité, un rythme, une respiration.

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