Billet de blog 2 septembre 2024

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C comme Césarisme démocratique.

C comme Césarisme démocratique (de Napoléon III à Macron)

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C comme Césarisme démocratique.

Le césarisme renvoi historiquement au mode de gouvernement autoritaire et même guerrier de César (avant JC) mais avec appui du peuple au plan de la légitimité intérieure et allocation de certains droits aux peuples vaincus.

Le terme a été employé pour plusieurs dictateurs mais c'est surtout Napoleon III qui a concentré un usage critique. Et la formule "césarisme démocratique" a trouvé à s'employer ultérieurement dans un cadre de démocratie représentative autoritaire. On a pu cependant lui préférer "démocratie césariste" : nuance en note 1.

Le césarisme contemporain se passerait bien du suffrage universel mais c’est devenu de nos jours un passage obligé pour gouverner, un passage qui n’empêche nullement d’aller vers des « démocratures illibérales »  ou demo signifie intervention du peuple via le suffrage universel (le vote et les urnes) et « crature" au lieu et place de « cratie »  (cratos) pour pouvoir excessif, autoritaire, l’ajout illibéral montrant, si besoin, que des droits démocratiques sont bafoués

- Le césarisme démocratique de Napoléon III

Le césarisme démocratique constitue le chapitre IV du Que sais-je ? sur le bonapartisme de Frederic Bluche décédé en janvier 2024 (1ère ed en 1981- Deux auteurs ont continué la diffusion).

Illustration 1
bonapartisme © Ch DLR - Mediapart

A propos de Napoléon III, il signale (page 88) que c'est le grand juriste Raymond-Théodore Troplong président du Sénat qui interpréta le nouveau régime comme césarisme démocratique.  

Le peuple souverain a conféré l'impérium - le pouvoir absolu - à un César qui le représente. On a parlé de "bonapartisme rural" pour ce soutien. La référence à la Révolution de 1789 est toujours présente mais les pouvoirs sont concentrés sur la personne de l'empereur au détriment du Parlement. Les élections sont également maintenues avec un sens plébiscitaire mais le pouvoir est au main de l'empereur, à l'image de César, d'ou l'expression "césarisme démocratique ». 

- Le césarisme démocratique de Macron .

Le rapprochement avec la présidence de M Macron et ses manoeuvres de contournement du Parlement et maintenant de rejet que l'on pourrait dire trumpiste du suffrage se rattachent à ce pouvoir présidentiel fort en lien avec maintien des élections démocratiques. 

Mais au plan de la légitimité, Napoléon III était lui populaire de part son "bonapartisme rural" déjà cité à une époque ou la classe ouvrière était faible numériquement et la paysannerie forte (jusqu'à 70% !). Macron n'est lui guère populaire en ce moment, ni dans les villes ni dans les campagnes. Il n'est soutenu que par les classes aisées et bourgeoises. Il s'accroche au pouvoir au risque de déclencher un mouvement démocratique (le 7 septembre) et social (le 1 octobre) de rue .

- Pour aller plus loin quelques lectures nécessaires.

César

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_C%C3%A9sar

Jules César a-t-il inventé le césarisme ?

https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/29/jules-cesar-a-t-il-invente-le-cesarisme_5403483_3232.html

Second Empire : césarisme démocratique

https://cours-de-droit.net/second-empire-cesarisme-democratique/

Le retour du césarisme

https://shs.cairn.info/citoyennete-republique-et-democratie-en-france--9782200294045-page-173?lang=fr

- En proximité du sujet :

- La question d'une sorte de "gouvernance oligarchique" à l’Elysée  (en 2007 pour N Sarkozy)

Ici c’est Dominique Rousseau qui décrit l'installation d' « une sorte d’oligarchie » à l'Elysée . Cela accompagne une pratique politique césariste (comm demo 2023) ou bonapartiste (A Bellon) . Le césarisme démocratique se marie donc avec un oligarchisme particulier de commissions d’experts 

La critique la mul­tiplication des postes de conseillers et autres commissions dans le système Sarkozy. Que représente l'influence de plus en plus notable des conseillers élyséens ? Nous sommes dans un fonctionnement présidentiel du régime politique. Le chef de l’Etat exerce seul le pouvoir et choisit les collaborateurs avec lesquels il veut ­décider. Par exemple, pour la politique étrangère : celui qui, dans ce domaine réservé, décide avec lui, c’est Jean-David Levitte, et non pas ce pauvre Bernard Kouchner (lire ci-contre). Les nominations, c’est Claude Guéant (secrétaire général de l’Elysée). Nicolas Sarkozy travaille avec un staff rapproché qui lui permet d'exercer le pouvoir de manière solitaire. Prend-il la place du gouvernement ? Il met en place, de manière sournoise, une structure parallèle de gouvernement avec des conseillers nommés par lui-même et dépendants de lui seul. De plus, avec la création de diverses commissions - celles de Balladur, de Rocard, de Vé­drine, ou d’Attali - dont l’objet entre dans le champ de compé­tences des commissions de l’Assemblée nationale, il court-circuite la représentation natio­nale. Il parle de revalorisation du rôle du Parlement mais sa pratique est inverse: c’est la démocratie de la commission ad hoc, dont il fixe la feuille de route. Il montre là sa défiance des corps constitués qu’il ne contrôle pas. Mais les conseillers occultes ont toujours existé... Oui, mais là, ça devient un système qui touche tous les secteurs gouvernementaux. Ce côté systématique rompt avec les périodes précédentes :?le nombre de conseillers a explosé par rapport aux présidences de François Mitterrand ou de Jacques Chirac. Cette façon de gouverner est-elle dangereuse pour la démocratie ? Oui, et pour deux raisons. La première c’est que tous ces hommes et ces institutions ne dépendent que de lui : ils n’ont aucun rapport avec le suffrage universel. Ainsi, une sorte d’oligarchie se met en place. Deuxième raison : face à ce fonctionnement, il n’y a aucun contre-pouvoir pour rééquilibrer l'ensemble. Aux Etats-Unis, que Nicolas Sarkozy semble prendre en exemple, il existe, face au Président, deux institutions indépendantes : le Congrès et la Cour suprême. En France, le Parlement est squeezé par les commissions, et les ministres par les conseillers. 

https://www.liberation.fr/evenement/2007/10/09/une-sorte-d-oligarchie-se-met-en-place_103420/

- Bonapartisme ou Constituante d'André Bellon (en 2014)

Le traité de Lisbonne a signalé la tentation autoritaire d’une partie des élites. L’élection d’une Assemblée constituante en France permettrait-elle de la juguler ? 10 ans plus tard l'idée d'une Constituante sort du cénacle des initiés et fait l'objet de discussions populaires.

https://www.monde-diplomatique.fr/2014/04/BELLON/50294

Christian Delarue

1) Nuance citée en introduction sur deux expressions proches : Des membres d' "ATTAC Démocratie" usent ici (lien) de l'expression "démocratie césariste" et non de "césarisme démocratique" . Dans la première expression l'accent est mis surtout sur la démocratie (représentative) pervertie par une dérive césariste plus ou moins forte et qu'il faut corriger et même détruire. Dans le second cas on part du césarisme (comme pour Napoléon III) et on signale un cadre d'implantation et de légitimation de type démocratie représentative. A cette nuance prés les deux expressions sont équivalentes.

Etendre et approfondir la démocratie : pour une autre démocratie, une autre constitution

https://france.attac.org/nos-idees/etendre-et-approfondir-la-democratie/article/pour-une-autre-democratie-une-autre-constitution

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