Laurent Eyraud-Chaume
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Billet de blog 29 août 2013

Laurent Eyraud-Chaume
comédien/conteur au sein de la compagnie Le pas de l'oiseau, rédacteur en chef d'Alp'ternatives
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La Juncha: faire ensemble! (Portrait d'association)

Laurent Eyraud-Chaume
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Petite soeur d'une AMAP, la Juncha est l'association qui prouve qu'il se passe quelque chose dans le Champsaur. Les idées d'alternatives gagnent du terrain et se marient petit à petit à un monde rural en quête de nouveaux chemins.


Illustration 1
© 

Quand et comment a été fondé votre association ?
L'initiative est née de la volonté d’un groupe d’habitants du Champsaur, actifs au sein de l’AMAP (Association pour le maintien de l’agriculture paysanne) alors déjà en place, de créer un lieu qui soit à la fois un point d’approvisionnement en denrées complémentaires de celles de l’Amap et un café qui proposerait animations et échanges dans un cadre convivial, un lieu d'action et de réflexion. L'idée était également de recréer un café et une épicerie de village car la plupart des petits villages du Champsaur ont progressivement vu fermer ces lieux de lien social par excellence.
Huit bénévoles motivés et pleinement impliqués dans le projet ont donc créé l’association au printemps 2010. Pourquoi "La Juncha"? C'est dans un dictionnaire de patois champsaurin que le nom de l'association a été recherché : il signifie un moment de travail collectif et solidaire, qui sera suivi d'un temps convivial où l'on fête le travail accompli… Il s'agissait pour les fondateurs de l'association d'insister sur le caractère collectif de l'initiative, sur la complémentarité et la diversité des énergies à réunir pour mettre en œuvre le projet. En patois du Queyras, le terme signifie la brassée ou la poignée, révélant là aussi l'idée du lien, du collectif, de ce qui peut être réuni et tenir ensemble.
Quel est votre but ?
La Juncha a ouvert au mois de mai 2012 une épicerie-café associative dans le Champsaur, baptisée le « Cafépicerie ». Le lieu accueille à la fois une épicerie proposant des produits bio et locaux (alimentaires et non-alimentaires), un café proposant des animations diverses (concerts, projections-débats, conférences, ateliers d'échange de savoirs…) ainsi qu'une petite ludothèque. Le "Cafépicerie" est un lieu de vie multiple, ouvert à tous et aux initiatives de chacun ! De plus, l'association est actuellement en train de développer un service de commande/livraison à domicile qui permettra d'apporter un service aux personnes isolées ou peu mobiles et de développer des solidarités dans la vallée.
Si l’on reprend les statuts, l’association a pour objet de :
- maintenir et de promouvoir une agriculture de proximité, écologiquement saine, socialement équitable et économiquement viable ;
- développer des relations privilégiées entre consommateurs et producteurs ;
- animer un lieu trans-générationnel, inter-associatif et d'animation culturelle favorisant le lien social dans la vallée.
Au-delà de ces objectifs formellement définis dans les statuts, l’association inscrit son action dans des objectifs plus larges tels que la relocalisation de l’économie et de la production alimentaire, la transformation des modes de consommation, la promotion des circuits-courts… et surtout la prise en main de ces sujets par des citoyens ordinaires ! L'association se construit à la fois comme un espace de médiation, de débats sur les sujets socio-économiques et écologiques, et comme un cadre de concrétisation, par l’action, des valeurs communes. Aussi, si l'association comprend une équipe salariée, l'initiative reste fortement animée par les adhérents et les bénévoles de l'association, dans une logique d’éducation populaire. A l'heure des scandales qui touchent l'industrie agro-alimentaire, La Juncha permet à des citoyens - qu'ils soient producteurs ou consommateurs - de se réapproprier des questions telles que la production agricole, l'alimentation, les modes de consommation et les circuits de distribution. En bref, les personnes impliquées dans la mise en œuvre du projet de l’association participent concrètement à la construction d'une économie plus humaine, prennent conscience des enjeux et défis que cela représente et élaborent collectivement des réponses…
Quels sont vos difficultés ?
La principale difficulté de La Juncha est de trouver un équilibre entre l’éthique et les valeurs qui sont à l’origine du projet et les contraintes économiques. Avec une activité commerciale, nous sommes dans le marché tout en essayant de ne pas jouer le jeu de la concurrence et de la compétition mais plutôt celui de la coopération. En plus les demandes des clients, adhérents ou non de l’association, sont parfois contradictoires avec nos objectifs de l’association (demandes de produits exotiques, hors saison…) car les habitudes alimentaires sont bien ancrées et qu’on a moins le réflexe de cuisiner du topinambour que des tomates !
Enfin, contrairement à ce qu’on pourrait penser, travailler en circuit court n’est pas toujours simple. En l’occurrence, proximité géographique ne rime pas avec facilité d’approvisionnement. Il est plus facile de se faire livrer une palette de produits par une centrale d’achats que de s’approvisionner auprès de multiples petits producteurs locaux, cela demande du temps, de l’énergie et des moyens logistiques…
Vos forces ?
L'implication des bénévoles dans la gestion de l'épicerie et sur la vie associative au sein des différentes équipes, dans l'animation des soirées et la prise en main du café, de l'accueil.
Des relations de confiance et de partenariat avec le Conseil Régional PACA, le Fonds social Européen, la Fondation de France, le Conseil Général 05, nous ont permis de lancer le projet et de recruter des salariés pour permettre l'ouverture du Cafépicerie. Ces soutiens financiers et moraux sont aujourd'hui indispensables et l'objectif est d'aboutir à un autofinancement en 2015.
Dans un monde idéal, à quoi ressemblerait votre association ?
Dans un monde idéal, il n'y aurait pas besoin d’association. Seulement des groupements collectifs et citoyens. Chacun de nous serait complémentaire de son voisin pour assurer la majorité des productions alimentaires que permet le territoire, avec l'idée de recentrer au niveau local le maximum de productions. Il existerait des regroupements collectifs et citoyens (qui peuvent être des associations ou non, des coopératives..) qui favoriseraient les échanges entre les personnes, mais aussi les échanges de productions et de services, en toute convivialité ! En fait, il s'agit de recréer ce que le capitalisme et l'individualisme nous ont enlevé, c'est à dire la solidarité et le sens du collectif...mais en s'appuyant sur le progrès des sciences, technologies et des connaissances qui représentent un intérêt pour le bien-être de l'humanité et ne doivent pas être au seul bénéfice d'intérêts particuliers.
Fiche d'identité
Nom : La Juncha
adresse : Le Moulin du Serre – 05260 Saint Léger les Mélèzes
courriel :lajuncha@gmail.com
site : http://lajuncha.wordpress.com
nombre d'adhérents : 74
nombre de salariés : 2

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