Plus je réfléchis aux vertus de l’action collective et plus je me sens seul.
Mais dès que je me retourne, je redécouvre toute la richesse des écrits nombreux qui sont de vrais écrits au sens de l’idée, de la sensation, de la découverte qui se donne la peine de travailler son chemin et je me sens appartenir à une communauté.
Cette communauté s’est construite autour de l’initiative de quelques journalistes de créer un journal indépendant des pressions gouvernementales et indépendant des pressions financières directes ou indirectes, indépendant des partis politiques.
L’abonné à Médiapart, de mon point de vue, ne peut pas se contenter d’être un simple consommateur de cette liberté d’expression. Comme “les acquis sociaux” ou “les acquis de civilisation”, la liberté d’expression n’existe que si on la défend activement.
Il est clair que le nombre actuel des abonnés ne peut pas permettre à ce journal de se projeter dans la durée et il est tout aussi clair que la seule qualité du travail des journalistes n’est pas suffisante pour percer les mur d’étouffement que notre société libérale maîtrise sur le bout des doigts, ni le mur de conservatisme lié à la peur de ne pas faire comme tout le monde qui fait se déplacer les masses par millions avec l’audimat qui ne manque jamais de refaire l’appel pour vérifier que tout le monde est bien là.
Les bonnes volontés individuelles sont certes importantes, la lecture du journal, la participation qui se donne l’objectif de la qualité et le temps de la réflexion, le partage devenu techniquement facile d’un certain nombre d’articles avec des amis.
Mais ces actions ne peuvent remplacer une information plus systématique au niveau d’une ville, d’un quartier ou d’une région, l’organisation d’événements propices à des interrogations par chacun sur ses propres engagements, des interrogations sur la presse et sur l’information, ni la mise en valeur d’un certain nombre d’initiatives individuelles propres à créer des effets mobilisateurs vis-à-vis des visiteurs du club.
La nécessité d’une association des lecteurs de Médiapart ne fait donc aucun doute pour moi.
Cette nécessité étant affirmée, je remercie ceux qui ont pris l’initiative de créer cette association, qui ont pris le temps et l’énergie de la faire exister puisque tout projet repose inévitablement sur l’initiative et l’investissement de quelques-uns avant devenir un projet collectif.
Le soupçon vis-à-vis des initiateurs me paraît ridicule mais cela ne dispense pas l’association d’avoir à gagner sa crédibilité, ses responsables d’avoir à gagner leur représentativité.
Reste donc à assurer cette crédibilité, à réaliser l’indépendance vis-à-vis de tel ou tel courant alors que Médiapart est ouvert à tous, à rafermir la gestion démocratique, reste à trouver l’expression mobilisatrice de ce projet.
La convocation d’une Assemblée Générale me semble de nature à créer les conditions d’un redémarrage sur de bonnes bases…
à condition toutefois qu’un nombre conséquent d’abonnés deviennent adhérents de l’association pour prendre part aux décisions qui la concerne, (je rappelle si nécessaire que seuls les adhérents sont habilités à voter les statuts, à choisir les membres du CA, à se prononcer sur les projets ou à en proposer eux-mêmes… ce qui n’enlève pas le droit d’opinion et de commentaires des non-adhérents)
à condition qu’un large appel à candidature aux Conseil d’Administration soit lancé d’ici octobre et que toute la technologie de l’Internet soit utilisée pour permettre un vote et une participation aux décisions de tous les adhérents quelle que soit leur disponibilité pour se rendre aux réunions du CA ou de l’Assemblée Générale (réunions qui bien sûr n’en sont pas moins indispensables),
à condition enfin que les statuts reflètent bien la volonté démocratique exprimée.