Billet de blog 3 décembre 2015

amosca@theatredelaville.com

Abonné·e de Mediapart

EN GLANANT DANS L’AIR DU TEMPS

Avec Les Glaciers grondants, David Lescot mène une enquête documentée, mais aussi poétique, sur les changements climatiques. Pour le journal du Théâtre de la Ville, il précise son processus d’écriture et de mise en scène.

amosca@theatredelaville.com

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
glaciers-web

VOUS VOUS INTÉRESSEZ DONC AU TEMPS QU’IL FAIT…
DAVID LESCOT: Cet intérêt vient du Conte d’hiver de Shakespeare, pièce que j’affectionne particulièrement. Les êtres y sont déterminés par le climat, qui dicte leurs retournements d’humeur, leurs passions, leurs embrasements. Nous sommes soumis à des variations météorologiques, brusques, violentes, dans nos impressions et nos sentiments. Cette réflexion poétique s’est peu à peu étendue aux enjeux environnementaux, politiques… planétaires qui concernent l’humanité et tout un chacun. Ce sujet relie le ressenti le plus intérieur et la situation mondiale. Ça me plaît !
LA PIÈCE EST CRÉÉE TANDIS QUE SE DÉROULE LA 21e CONFÉRENCE DES PARTIES DE LA CONVENTION-CADRE DES NATIONS UNIES SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES DE 2015, LA COP21. QUELS EN SONT LES ASPECTS QUI ONT RETENU VOTRE ATTENTION?
D. L. : La question climatique me concerne mais je n’y connaissais pas grandchose. Je me suis efforcé de me documenter, j’ai observé les discours préparatoires du sommet, les jeux des uns et des autres, la théâtralisation des débats, les discussions occasionnées entre les citoyens. Je n’écris pas une pièce sur la COP21. J’ai plutôt développé une réflexion baladeuse, hasardeuse aussi, en glanant dans l’air du temps.
QUEL A ÉTÉ VOTRE PROCESSUS D’ÉCRITURE ET VOS MATÉRIAUX DE TRAVAIL?
D. L. : Depuis deux ans, je lis, je collecte de nombreux éléments documentaires, notamment à travers des rencontres, des entretiens avec des scientifiques spécialistes du climat, qui ne sont pas toujours d’accord entre eux d’ailleurs ! S’y mêle l’histoire personnelle d’un écrivain, qui reçoit commande d’un article par un grand quotidien à l’occasion de la COP21. Il tente de comprendre les changements climatiques et mène l’enquête pour se forger un point de vue. Parallèlement, il vit les turbulences d’une séparation et assiste aux répétitions du Conte d’hiver. Ses questionnements scientifiques trouvent alors une résonance très intime. Il se met à regarder ses souvenirs et sa vie amoureuse à l’aune des variations météorologiques. Ce personnage tisse ainsi le lien entre les différentes séquences qui forment un drame documentaire à stations. Le spectacle s’invente au fur et à mesure des répétitions, il évolue au gré des improvisations, de l’actualité, des échanges avec les acteurs. J’essaie de composer une poétique scientifique.
VOUS DESSINEZ LA FIGURE D’UN ARTISTE CONCERNÉ PAR LE MONDE QUI L’ENTOURE. LA VÔTRE?
D. L. : À travers cette posture de l’auteur se trame une réflexion sur la place de l’art dans nos existences. Je crois qu’on saisit mieux le monde quand il est sublimé par la création artistique car on le ressent mieux. Le théâtre génère de la compréhension et de l’émotion, ce qui permet d’appréhender le réel dans sa complexité.
SUR LE PLATEAU, VOUS CROISEZ LES FORMES ET LES DISCIPLINES.
D. L. : On essaie de recréer avec les artifices de la scène les impressions que produisent les phénomènes de la nature, dans une version de théâtre baroque d’aujourd’hui. Un solo de batterie peut par exemple évoquer une tempête. La magie du théâtre me semble d’autant plus forte qu’on voit comment elle se fabrique.
Entretien réalisé par Gwénola David
Les Glaciers grondants du 4 au 18 décembre aux Abbesses

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L’auteur n’a pas autorisé les commentaires sur ce billet