Billet de blog 14 janvier 2016

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Comédie acide

Dans Le Retour au désert, une pièce de Bernard-Marie Koltès qui a pour toile de fond la France des années 1960, minée par la guerre d’Algérie, Arnaud Meunier réunit Catherine Hiegel et Didier Bezace.

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Le théâtre d’Arnaud Meunier ? Un théâtre politique, ancré dans notre société. Un théâtre qui s’attache à dépasser le vase clos d’un microcosme artistique uniforme. Cela, non seulement pour se faire le miroir des questionnements et des problématiques de son époque, mais aussi pour rendre compte physiquement, concrètement, sur le plateau, de la réalité et la diversité du monde (rappelonsnous de sa mise en scène de 11 septembre 2001 de Michel Vinaver, présenté au Théâtre de la Ville avec quarante-cinq lycéen-ne-s de Seine-Saint-Denis). Ainsi, rien d’étonnant à ce que l’actuel directeur du Centre dramatique national de Saint-Étienne ait baptisé la compagnie qu’il a fondée en 1997 Compagnie de la Mauvaise Graine. Rien d’étonnant, non plus à ce qu’il investisse aujourd’hui l’écriture de Bernard-Marie Koltès, auteur dont l’oeuvre est traversée par les thèmes de la marge, de la différence, de l’exclusion…
Dans Le Retour au désert, pièce créée en 1988, une femme rentre chez elle (Mathilde, rôle écrit pour Jacqueline Maillan, ici incarné par Catherine Hiegel), dans une petite ville française du début des années 1960. Elle revient d’Algérie, avec ses deux enfants, pour reprendre ses droits sur la maison familiale qu’occupe son frère, un ponte de la bourgeoisie locale (Didier Bezace reprend ce rôle interprété à la création par Michel Piccoli). En retrouvant la terre qui l’a vue naître, Mathilde fait face aux eaux troubles d’un pays submergé par des idées et des agissements délétères. Un pays sur lequel planent des zones d’ombre : les épurations sauvages de la Libération, les attentats de l’OAS, la guerre d’Algérie, les sentiments racistes que nourrit une part grandissante de la population. Malgré tous ces fantômes, Bernard-Marie Koltès a conçu Le Retour au désert comme une comédie. Une comédie acide, violente, cruelle, dont Arnaud Meunier s’empare pour répondre au danger que représente la montée actuelle du Front national. Une nouvelle fois, le metteur en scène fait du théâtre un lieu de réflexion citoyenne. Il place la France de 2015 face à elle-même. En interrogeant notre mémoire et la notion d’étranger.
Manuel Piolat Soleymat
Le Retour au désert de Bernard-Marie Koltès du 20 au 31 janvier

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