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Rarement présenté au public français, ce classique du répertoire de l’Opéra de Pékin s’inspire d’une saga du XIe siècle, à un moment où les femmes de la famille Yang prennent la relève combattante.
Pièce martiale de forme traditionnelle, écrite en 1960 par Fan Junhong et Lü Ruiming et devenue un des classiques du répertoire de l’opéra de Pékin, Les Femmes générales de la famille Yang est inspirée par une saga située au XIe siècle, alors que la Chine est sous la menace de ses voisins. Elle marque la fin d’un cycle, après que trois générations d’hommes du clan des Yang ont péri au combat. Douze femmes aguerries, veuves ou filles des officiers disparus, placées sous l’autorité d’une aïeule centenaire, s’apprêtent à prendre la relève et parviennent à convaincre un empereur hésitant de poursuivre les combats.
Les Femmes générales de la famille Yang prolongent une série d’oeuvres chantées où les figures féminines triomphent de l’adversité par leur bravoure et leur intelligence, loin de la « défaite des femmes » de l’opéra occidental. La vaillante Mu Guiying est chargée de conduire les opérations de reconnaissance et emmène avec elle son jeune fils, impatient de reprendre le flambeau. Les scènes joyeuses alternent avec des épisodes de grande tension dramatique. La pièce s’ouvre par les préparatifs d’un anniversaire dont l’atmosphère est assombrie par l’annonce de la mort du mari de Mu Guiying. Elle s’achève par la victoire des héroïnes et fait alterner les chants et les parties parlées. Les personnages correspondent tous à des rôles types : « héroïne martiale », « femme âgée », « jeune-homme ». Les « bouffons » caractérisent les personnages subalternes ou moralement contestables. Les « visages peints » dont les couleurs sont appliquées à même le visage représentent les figures de l’excès ou de la partialité. Selon cette typologie, seuls les « personnages à barbe » sans maquillage incarnent le « juste milieu » confucéen. Le jaune impérial permet de reconnaître le souverain à ses habits. Les sentiments sont exprimés d’emblée et ne laissent pas place à aucune forme d’évolution psychologique. L’intrigue consiste à retourner une situation défavorable en triomphant d’un adversaire en position de force par la stratégie. La découverte d’une route en encorbellement surplombant le camp ennemi, indiquée par un brave cueilleur de plantes médicinales, permet de reprendre l’avantage. En l’absence de décors, des tables superposées symbolisent des montagnes escarpées. Les bannières agitées par des comparses symbolisent les flammes. Les cravaches signalent la présence de montures invisibles et évoquent leur couleur. Les fanions au dos des générales indiquent leurs troupes. Le happy end se produit au terme de combats acrobatiques dans cette célèbre pièce très rarement présentée au public français.


Roger Darrobers
Enseignant et chercheur à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense; spécialiste du théâtre chinois.
Les Femmes générales de la famille Yang du 21 au 24 octobre

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