Billet de blog 27 janvier 2016

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AU DIAPASON DE L’ÉPUISEMENT

Encore peu connu en France, le jeune chorégraphe Jan Martens compose toute une gamme de sauts, jusqu’à la surchauffe extrême du geste et des corps.

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Sauter, sauter et encore sauter. De cet unique geste presque trop simple, si son dynamisme n’exigeait pas une résistance de choc, le chorégraphe Jan Martens, 30 ans, a fait le moteur de sa pièce pour huit danseurs THE DOG DAYS ARE OVER (2014). Pendant plus d’une heure, il y pousse son parti pris jusqu’à la surchauffe extrême du geste et des corps avec pour seule musique le son des baskets couinant et rebondissant sur le sol. Cette partition à la fois minimaliste et maximaliste fait monter la transe au diapason de l’épuisement vécu comme une tombée du masque de l’interprète liquéfié.
Le point de départ de ce spectacle, le premier créé par Jan Martens pour un groupe depuis ses débuts en 2010, est une citation du photographe américain Philippe Halsman : « Demande à quelqu’un de sauter et tu verras son vrai visage », a-t-il dit. Dont acte. THE DOG DAYS ARE OVER tend un miroir sans fard vers l’humain saisi dans un effort durable sans dévier de sa route d’un millimètre. « Quel est le vrai visage de la danse par ces temps incertains? s’interroge le chorégraphe. Que voulons-nous montrer? Que voulons-nous voir ? »
Au fil du spectacle, Jan Martens complexifie son propos en stratège. Il fait exploser les sauts au gré de multiples variations. Plus ou moins haut, d’une jambe sur l’autre, en roulant les fesses, balançant les bras, en tournant d’une direction à l’autre, la gamme semble s’inventer d’elle-même. Dans le même élan, il déploie les évolutions des interprètes au gré de contrepoints permanents qui modulent le groupe, l’éclatent et le recomposent dans un système d’échos gestuels, rythmiques et sonores. Une orchestration fluide fait la force d’impact du spectacle en débordant ce que le saut peut avoir d’univoque.
Encore peu connu en France, alors que son nom a rassemblé quatre cents danseurs pour l’audition de THE DOG DAYS ARE OVER, Jan Martens se déclare obsédé par l’humain dans son travail. Venu tard à la danse – il commence à 18 ans –, il se glisse dans les codes de l’académie de danse Fontys, à Tilburg (Pays- Bas), puis du conservatoire d’Anvers d’où il sort en 2006. Épris de concept et de mouvement, il aime à dire « qu’il part d’une seule idée ou d’une image qui s’épanouissent et prolifèrent ». THE DOG DAYS ARE OVER en apporte la preuve par huit.
Jeanne Liger
THE DOG DAYS ARE OVER de Jan Martens du 26 au 30 janvier aux Abbesses

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