Au sujet du livre Le Cinéma ouest-africain francophone de Mame Rokhaya Ndoye
Vu de France, le cinéma d’Afrique noire s’est fait de plus en plus rare sur les écrans de cinémas, en sorties officielles comme dans les festivals. « Et pourtant, ils tournent ! » comme l’affirme avec un élan d’espoir le sous-titre du livre proposé par Mame Rokhaya Ndoye. « Ils » ce sont les cinéastes qui sont à la fois réalisateurs, producteurs, scénaristes et parfois même les diffuseurs de leurs propres films. La situation semble à la fois atypique et révélatrice de l’esprit inventif et de survie dans des pays où l’industrie du cinéma est structurellement inexistante. Mame Rokhaya Ndoye, docteure en sociologie, spécialisées en socio-anthropologie des arts et de la culture et en sociologie visuelle et filmique, membre du Centre de Recherche ISA (Imaginaire & socio-anthropologie) de l’Université de Grenoble, a centré ses recherches, pour parler du cinéma ouest-africain francophone exclusivement sur deux pays : le Sénégal et le Burkina-Faso. Cela ne signifie pas que les autres pays de cette aire géographique sont inexistants mais que les informations répertoriées sont issues de ces deux pays qui sont également à la pointe, malgré leurs difficultés, de la production du cinéma d’Afrique de l’Ouest. Le Burkina-Faso témoigne en effet d’une cinéphilie enracinée parmi son public et d’un festival à la fois panafricain et international, le FESPACO, qui donne une aura hors du commun à ce pays. Quant au Sénégal, la production de films documentaires se développent toujours plus alors que la fiction est bien plus présente dans la production burkinabé.
Cet ouvrage analyse avec perspicacité et à renfort de nombreux témoignages des professionnels locaux de cinéma concernés par les enjeux actuels, les contraintes et dynamiques propres à ces deux pays. Il en ressort des stratégies individuelles de réalisateurs d’une nouvelle génération apparue au début des années 2000 avec l’apparition du numérique baissant les coûts de production mais aussi avec le défi à relever face à la diminution drastique des financements des pays européens. Le cadre juridique propre à la politique de chaque pays en matière de soutien de son propre patrimoine culturel est mis en valeur avec les difficultés inhérentes à un fonctionnement qui n’est pas encore transparent et démocratisé. Les réalisateurs sénégalais et burkinabés doivent en permanence développer de nouvelles stratégies pour réaliser leurs projets avec une force de conviction sans égal, tout en développant un réseau essentiel à toutes les étapes de la réalisation de leurs films, que ceux-ci soient destinés à un public institutionnel, télévisuel, local, festivalier, européen ou international.

Le Cinéma ouest-africain francophone. Et pourtant, ils tournent !
de Mame Rokhaya Ndoye
Nombre de pages : 204
Date de sortie (France) : 19 août 2019
Éditeur : L’Harmattan
Collection : Logiques Sociales