Parution du roman graphique : Le Grand Je de Rachel Deville
Quelle est la norme dans un monde où chaque corps humain n’est pas composé des mêmes membres ? Est-ce un cauchemar ou une séquence de La Planète sauvage (1973) de René Laloux ? Cela y ressemble d’autant plus que le récit évoqué est celui d’un homme à trois têtes qui évoque sur le divan de son analyste son mal-être dans une usine à la chaîne où sa spécificité physique est exploitée éhontément. Avec une distance critique interrogeant sans cesse la place de l’individu dans une société trop endommagée socialement pour offrir une place à chacun e, Rachel Deville crée un monde unique très inquiétant parlant avant tout des troubles mentaux causés par des activités professionnelles inhumaines.
Les individus sont dès lors isolés et incapables de nouer du contact dans une situation de détresse humaine profonde. Le récit devient dystopique en se concentrant sur un monde du travail aliénant à l’instar du protagoniste de La Classe ouvrière va au paradis (La classe operaia va in paradiso, 1971) d’Elio Petri. L’aliénation dans une usine à la chaîne conduit en un autre enfer déshumanisant sur un centre d’appel où l’exploitation asservit les êtres.
Rachel Deville cultive avec finesse un monde étrange en Noir & Blanc avec un sens de l’absurde enraciné malgré tout dans le réalisme des situations d’incertitude sociale profonde.
Agrandissement : Illustration 1
Le Grand Je
de Rachel Deville
Nombre de pages : 160
Format : 19 × 26 cm
Date de sortie (France) : 15 septembre 2023
Éditeur : Atrabile