Au sujet du livre Quentin Tarantino ou le crépuscule de l’image de Yannick Rolandeau
Avant de déclarer son hommage à Woody Allen dans Le Cinéma de Woody Allen et écrire la légende noire méconnue d’un courant cinématographe célèbre dans Nouvelle Vague, essai critique d’un mythe cinématographique, Yannick Rolandeau avait tiré à boulets rouges furibonds sur Quentin Tarantino. Les films du cinéaste adulé de la critique, du public et des festivals dans un formidable consensus, est ici la cible privilégiée des analyses de Yannick Rolandeau qui voit en lui la manifestation même de tout ce qu’il peut haïr dans l’idée de postmodernisme. La critique ici, même si elle se consacre à étudier à travers chacun des films de Tarantino avec une grande précision, dépasse finalement le cinéaste pour toucher du doigt ce qu’il représente : la fin du classicisme du cinéma hollywoodien du code Hays, époque nostalgique de l’auteur de ce livre puisque les réalisateurs ont été poussé à l’invention : certes, mais faut-il remercier un bourreau d’avoir fait de sa victime un être résistant et résiliant ?
Les analyses réunies dans ce livre consacré aux films d’un cinéaste sont finement avancées et développées mais bien trop utilisées, hélas, dans le but de parvenir à un unique objectif consistant à détrôner le sieur Tarantino de son piédestal.
Il est vrai que les films qui remportent les plus larges consensus de communautés distinctes peuvent effrayer, mais de là à ne jamais parler d’un savoir-faire pour un cinéaste dont ne partage pas les mêmes valeurs esthétiques et idéologiques, cela conduit à diaboliser une personne. Les arguments avancés ici par Yannick Rolandeau sont toujours très intelligents et perspicaces, parfois difficiles d’accès par les concepts mobilisés, mais souvent plus dangereux par leur absence de second degré qu’ils supposent que l’idéologie présupposée pour le cinéaste décrié. Ainsi, Tarantino est souvent présenté par l’auteur comme un adolescent immature sans génie recyclant les sous-genres du cinéma dans les poubelles de l’histoire officielle : mais pourquoi l’en blâmer ? Au contraire, Tarantino a permis de repenser la marge sociale pour amener à réfléchir des mises en scène encore tabou quelques décennies plus tôt. Aucun des savoir-faire de Tarantino cinéaste n’est ici mis en valeur, ni même sa cinéphilie : dès lors le parti pris de faire du cinéaste le bouc émissaire dans une guerre avérée contre le post-modernisme est bien trop omniprésent pour accepter l’ensemble de cette lecture sans un net recul critique. C’est dommage car l’intelligence des analyses de Yannick Rolandeau est fascinante et mérite une véritable attention.

Quentin Tarantino ou le crépuscule de l’image
de Yannick Rolandeau
Nombre de pages : 170
Date de sortie (France) : mai 2014
Éditeur : L’Harmattan