Le choix des mots n’est jamais innocent
On le sait. Pour annoncer la mort de Le Pen, la Presse, parfois, a joué de l’euphémisation ; comme certains membres du gouvernement, d’ailleurs. A la Une de Sud-Ouest, une grande photo de Le Pen, dans son salon bourgeois d’assez mauvais goût, sous-titrée « Une vie à l’extrême ». Comme si préciser qu’il s’agit de l’extrême droite ne s’imposait pas. Il est vrai que l’annonce des articles que l’on va trouver à l’intérieur du journal est plus explicite : « Fédérateur de l’extrême droite, il fut souvent condamné pour ses dérapages racistes et antisémites » « Dérapages », vraiment ? Le terme n’a de sens qu’à imaginer une voie sans histoire dont l’on dévie pour une raison ou une autre, dont un accident de parcours nous éloigne malencontreusement (chaussée humide ou glissante, perte de contrôle d’un véhicule qui, jusqu’à présent, suivait son petit bonhomme de chemin). « Dérapages » minimise par là-même la portée des termes qui le qualifient. Le Pen n’a nullement « dérapé » : les propos pour lesquels il a été condamnés parce qu’ils contrevenaient à la loi s’inscrivent parfaitement dans une trajectoire politique constamment animée par le racisme et l’antisémitisme, depuis le début jusqu’à la fin - cette photo de Le Pen, déjà, malade, écoutant un groupe de musiciens se réclamant du nazisme en est la preuve.
Et l’on voudrait qu’on lui manifeste du respect, en oubliant l’infect personnage qu’il fut ? C’est du moins ce que réclame le ministre de l’intérieur qui est profondément choqué par les manifestations de joie qui ont éclaté à l’annonce de la mort de celui qui ne fut pas un adversaire mais un ennemi de la République.
Billet de blog 8 janvier 2025
Dérapage contrôlé
Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.