Il y a de cela quelques années, lorsque certains regrettaient que les bateaux ne puissent plus venir accoster devant la place de la Bourse, pour cause de miroir d'eau et soient contraints de le faire en face de la Bourse maritime, qui n'est qu'un gros bâtiment sans grand intérêt architectural, l'épouse du maire de Bordeaux se moquait de ces défenseurs du patrimoine qui n'étaient pas rebutés par la laideur de ces HLM de luxe qui obturaient la vue sur les côteaux de la Garonne. Que dirait-elle de la future cité municipale en cours d'édification presque en face du Palais Rohan ?
c'en est désormais fini des couchers de soleil que l'on pouvait admirer depuis la rue des Trois-Conils et la rue Montbazon, il n'y a plus rien à voir qu'un bloc compact. Mais il y a pire, cette cité municipale s'élève, cours d'Albret, à côté du délicieux hôtel de Basquiat, cet hôtel du xviii ème dont Robert Coustet écrit :"encadrée par des communs où, entre des bossages, alternent larges arcades et étroites travées, la façade est un chef d'oeuvre. Dépourvue de tout décor sculpté, elle joue sur les décrochements du portique, des pavillons latéraux, sur les reliefs des frontons, des bossages et des corniches pour créer une calme eurythmie au 'vibrato ténu(F.G.Pariset)".(Lenouveau viagraphe de Bordeaux, guide historique et monumental des rues de Bordeaux)
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Le futur viagraphe bordelais qui aura à décrire l'immeuble édifié par l'architecte Paul Andreu ne pourra pas faire preuve du lyrisme précis et discret de Robert Coustet - une oeuvre mastoc et sans génie, comme on en trouve des dizaines, il est vrai, dans les quartiers neufs de nombre de villes (mais nous sommes là en lisière d'une architecture classique) n'appelle qu'un vocabulaire aussi pauvre que l'imagination de son concepteur : rien ne vient rompre la monotonie des ouvertures dans la grisaille du béton (merci Bouygues !, on a entassé les étages les uns sur les autres sans souci de faire respirer l'ensemble. Un immeuble droit dans ses bottes, sans doute, mais dont on comprend mal qu'une municipalité qui se targue d'urbanisme puisse lui avoir donné son aval. Sans doute sommes-nous à côté de Meriadeck, un quartier voulu par Chaban et dont la réussite architecturale est discutable - mais au moins avait-on, jusqu'alors, laissé une sorte de cordon sanitaire - un espace planté d'arbres, en l'occurrence - qui reléguait les immeubles à l'arrière-plan du cours. Désormais, la nouvelle construction est dans son alignement exact.
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Et pour qu'il soit bien clair que le jugement que je porte n'est en rien passéiste, à quelques mètres de là, Richard Rogers, l'un des auteurs du Centre Georges Pompidou, a su donner, avec le tribunal de grande instance, un exemple tout à fait réussi de création contemporaine.
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