L'émission "Les infiltrés" n'est pas une bonne émission tant sur le plan des principes que sur celui de la réalisation (beaucoup d'à peu près et d'erreurs). Mais elle a le mérite de bousculer les propos lénifiants qui peuvent être tenus sur des sujets controversés. En l'occurrence, à Bordeaux, la présence de groupuscules d'extrême droite qui trouvent un accueil pour le moins chalereux auprès des cathos regroupés autour de Saint Eloi et d'une institution d'enseignement libre dite de Saint Projet. Vieille tradition fachisante bordelaise sous sa forme la plus virulante. Les propos tenus par les gens de Dies irae, la haine de la démocratie,(on se prépare à en découdre sous la houlette de militaires qui entraînent au parcours du combattant viril, on se vante d'avoir tabassé des noirs, on se propose d'égorger les musulmanes lors du grand soir) l'antisémitisme, l'antiislamiste, le racisme quotidien aveugle et violent se retrouvent dans l'enseignement délivré à Saint Projet par une partie des profs et complètement assimilé par de délicieuses têtes blondes dont on ne peut croire que les parents ignorent ou désapprouvent le bourrage de crâne auquel est soumise leur progéniture. Tout cela est profondément nauséabond mais ne semble nullement dégoûter le prêtre de Saint Eloi.
Deux leçons à tirer : la première, c'est qu'il ne faut pas croire que le combat des "intégristes" se limite à la liturgie - elle est là pour dissimuler que le véritable ennemi est la démocratie et que leur combat est pour l'essentiel politique. Vieille leçon de l'histoire qu'on aurait eu intérêt à méditer : cette haine, depui 89, est tenace. Maurras a encore des fidèles.
Deuxième leçon : les autorités en place, tant politiques que religieuses, sont sérieusement malmenées. Juppé ne peut faire oublier que c'est lui et son équipe qui ont accordé à la troupe lefevbriste de s'installer à Saint Eloi - ils ont oublié simplement que cette église n'était pas désaffectée, c'est-à-dire qu'elle dépendait toujours de l'archevêché. Ce qui fut reconnu par le tribunal administratif qui donna raison aux plaignants, l'archevêque et Gilles Savary pour le PS. Mais personne ne voulut faire appliquer la décision du tribunal. On peut s'en étonner de la part de Juppé. Du côté des cathos, la position est constante de répugnier à faire intervenir la police pour régler ce type deproblème. La donne a changé, quand Benôit XVI a voulu faire la paix avec les lefevbriste et que l'abbé Laguerrie, prêtre de Saint Eloi, a fait partie de ceux qui cherchaient à se réconcilier avec Rome. Un accord fut trouvé, auquel Moneigneur Ricard ne fut pas associé, mais auquel il dut, par obéissance et par peur d'un affrontement direct avec le Vatican, se soumettre. Ces affreux de Saint Eloi ne sont plus schismatiques, ils font partie de la famille, même s'ils ont encore une position marginale. Les prêtres du diocèse, ceux du moins du presbyterium qui est le conseil qui entoure l'évêque, ont voulu se démarquer très nettement de ce dangereux copinage et ont condamné sans hésitation tous les propos tenus et la politique suivie jusqu'à présent par le Vatican ; l'archevêque a été beaucoup plus prudent. Il a seulement accordé la création d'une commission qui suivra de très près ce qui se passe dans Saint Eloi et ailleurs. La conférence cathollique des baptisés de France, un groupe de laïcs très en pointe dans la recherche d'une nouvelle gouvernance au sein de l'Eglise suit l'affaire avec beaucoup d'attention.
Toujours dangereux de vouloir faire ami/ami avec des gens qui de toute manière n'ont aucune envie de renoncer à leur position et qui saisissent les gestes de paix qui sont faits en leur direction comme autant de concessions qui leur donnent des points d'appui nouveaux pour continuer leur sale propagande. Il serait bon de ne jamais l'oublier.