jean j- laferrière

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La Provence – édition du 30 janvier 2011

LIGUE DES DROITS DE L’HOMME

Les libertés individuelles en débat à Venelles

Pourquoi Venelles? Ce n'est

sans doute pas un hasard si la Ligue

des Droits de l'Homme a

choisi cette commune pour organiser

son premier débat public.

D'autant qu'ici, on est à la veille

d'imiter la grande soeur aixoise

en matière de vidéosurveillance.

Même si l'objectif affiché par les

organisateurs est avant tout de

poser des questions en matière

de sécurité. Et, sur certains

points, de faire des propositions...

Philippe Senegas, président

de la section aixoise de la

LDH a introduit la séance devant

un public venu nombreux.

Précisant que ce premier débat

faisait suite à la signature, au

plan national, par une cinquantaine

d’organisations associatives

et syndicales, du "Pacte pour

les droits et la citoyenneté".

Pour illustrer et lancer la réflexion,

Gilles Sainati, magistrat

membre du Syndicat de la magistrature,

a fait un long exposé sur

le développement des outils de

vidéosurveillance, le fichage, la

biométrie… et leur compatibilité

avec les libertés individuelles.

Quel encadrement ? Pourquoi

cette généralisation ? Quelles

conséquences? Sécurité et liberté

vont-elles de pair ? "Depuis

2002 nous enregistrons 42 nouvelles

lois sécuritaires, cela engendre

une augmentation des poursuites

pénales", note-t-il. "Et

puis on a évacué le contradictoire…

on a démantelé la section

économique… on a introduit

l’automaticité des peines, prenant

exemple des pénalités routières…

avec pour conséquences

la tenue de fichiers…". Et de citer

le fichier STIC (Système de

traitement des infractions

constatées) regroupant les informations

concernant les auteurs

d’infractions "présumés coupables,

témoins ou victimes" interpellés

par les services de la police

nationale.

Le public n’a pas manqué de

poser des questions. François

Hamy, élu aixois d’opposition,

s’est interrogé sur Facebook

qu’il a qualifié de "STIC caché"

en tant que réseau social consultable.

Anne Mesliand, conseillère

régionale et présidente de la

commission "solidarité et sécurité,

santé et services publics", a

rappelé que la vidéosurveillance

n’était pas une politique de la Région

qui reste attachée à la prévention.

"Il ne faudrait pas qu’il y ait détournement

des dispositifs sociaux",

s’est-elle inquiétée. "Il

est prévu de renforcer la police

nationale par des effectifs citoyens

fortement indemnisés

avec les risques que l’on imagine",

a dit tel autre. "D’autant

que l’argument des maires est de

dire que la population le demande".

"Y a-t-il donc un risque de

clientélisme ?" Luc Foulquier,

responsable du Parti communiste,

s’exprime en tant que citoyen

et demande instamment que

l’on se projette dans l’avenir…

"Est-il bon de remplacer les humains

par des caméras et d’exploiter

la peur ?" Gilles Sainati

s’inquiète au final des conséquences

de la LOPPSI (loi

d’orientation et de programmation

pour la performance de la

sécurité intérieure) qui vise,

dit-il, "à développer la vidéosurveillance

et le transfert au privé

de la sécurité."

Philippe Senegas rappelle

pour conclure les propositions

concrètes du Pacte qui concernent

la démocratie, la protection

de la vie privée et des données

personnelles, les droits et libertés

face à la justice, à la police

et au système pénitentiaire, la

lutte contre les discriminations,

l’égalité sociale et les solidarités.

"Je suis preneur de l’avis des

élus", a-t-il précisé. "Il faut que

leurs réponses éclairent les citoyens."

A noter enfin qu'aucun

élu de la majorité municipale de

Venelles n'était présent. Le maire,

Jean-Pierre Saez, a simplement

déclaré : "J’assume complètement

le choix largement partagé

par les Venellois de la mise en

oeuvre de la vidéoprotection".

Marie-Pierre Peyrou, élue d’opposition,

présente au débat, a déclaré

avoir voté contre cette mise

en oeuvre. Et, au-delà de Venelles,

le débat reste donc très

ouvert.

S.L.

Gilles Sainati est l’auteur de la "Décadence sécuritaire", éditions La Fabrique.

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