Billet de blog 3 octobre 2024

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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La Montagne du dieu cannibale (La Montagna del dio cannibale) de Sergio Martino

Susan Stevenson avec son frère part à la recherche de son époux disparu en Nouvelle-Guinée lors d'une expédition ethnologique à la découverte d'une très ancienne peuplade anthropophage.

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Illustration 1
La Montagne du dieu cannibale La Montagna del dio cannibale de Sergio Martino © Artus Films

Sortie DVD : La Montagne du dieu cannibale de Sergio Martino

Librement inspiré du roman de Les Mines du roi Salomon (King Solomon's Mines, 1885) de l'écrivain britannique Henry Rider Haggard, La Montagne du dieu cannibale (La Montagna del dio cannibale, 1978) de Sergio Martino s'inscrit dans le genre en pleine ébullition dans la production italienne du mondo à travers l'exploration ethnocentriste comme expression du dernier vestige du regard colonialiste discriminant des cultures dites primitives.

Assumé pleinement et sans complexe comme film d'exploitation, les scènes horrifiques sont ajoutées gratuitement sans forcément nourrir l'intrigue dans un montage qui sollicite et rappelle sans cesse le regard voyeuriste du spectateur jusqu'à sa responsabilité à provoquer des scènes choquantes pour lesquelles une violence a réellement été exercée sur le tournage. Il en est ainsi des scènes prétendument documentaires du film où l'on voit des animaux découpés, éventrés ou encore s'entre-dévorer, réalisées à l'instigation du film.

De même, la dimension voyeuriste du film est largement exploitée avec l'érotisation du corps d'Ursula Andress facilement dénudé, sans oublier une scène d'orgie finale mêlant allègrement dans un feu d'artifices d'excès sans cohérence narrative anthropophagie, zoophilie, castration, masturbation féminine en gros plan, etc. Le film n'en est pas pour autant gore puisque les scènes sont surtout concentrées à la toute fin lors de la rencontre tant attendue avec la peuplade cannibale. L'histoire repose avant tout sur un récit d'aventures avec des séquences attendues de combats contre un serpent (un, puis deux, etc.) des araignées, des porteurs autochtones qui fuient de peur, une mission chrétienne évangélisatrice comme ultime expression de la civilisation, ainsi que le fantasme sexuel qui nourrit l'imaginaire touristique de la femme sauvage.

Sur un scénario sans surprise, Sergio Martino réussit à concentrer une telle somme de l'horreur de l'esprit colonial jusqu'à les motivations finales des personnages principaux [ATTENTION SPOILER] consistant à exploiter une mine d'uranium au détriment des populations locales : la violence extrême de celle-ci s'exprime dès lors à des fins punitives sur un monde blanc colonial qui n'en a pas fini de violer le monde.

Même si les initiatives de mises en scène sont très et hautement criticables du côté de la violence gratuite et réelle faite aux animaux au bénéfice de la réalisation du film, le malaise qu'il provoque témoigne d'une véritable charge contre le néocolonialisme qui se trouve autant au cinéma que dans la géopolitique des années 1970.

Quant à l'interprétation, grâce à l'implication et aussi la sobriété conjuguée d'Ursula Andress, Stacy Keach et Claudio Cassinelli, elle permet au film de se tenir de bout en bout malgré tous les excès du scénario et de la mise en scène.

Illustration 2

La Montagne du dieu cannibale
La Montagna del dio cannibale
de Sergio Martino
Avec : Ursula Andress (Susan Stevenson), Stacy Keach (le professeur Edward Foster), Claudio Cassinelli (Manolo), Antonio Marsina (Arthur Weisser), Franco Fantasia (le père Moses), Lanfranco Spinola (le consul Burns), Akushula Selayah (Sura), Carlo Longhi (Phil, le Pilote), Luigina Rocchi, Dudley Wanaguru, T.M. Munna, M. Suki, Giovanni Masini, Franco Cuccu, Franco Coduti, Claudio Morabito, Alfredo Senzacqua, Angelo Pennoni, Franco Freda, Adalgisa Favella, Rodolfo Ruzza, Giuseppe Romano, Luciana Pianella, Paolo Ricci, Matt Giordano, Fernando Massaccesi, Mario Massaccesi, Richard Weerakkody, Tom Felleghy
Italie – 1978.
Durée : 98 min
Sortie en salles (France) : 12 juillet 1978
Sortie France du DVD : 1er octobre 2024
Format : 2,35 – Couleur
Langues : anglais, français, italien - Sous-titres : français.
Éditeur : Artus Films

Bonus :
« Mort sous les tropiques » : Présentation du film par Curd Ridel (2024, 19’26”)
« Dans la jungle » : Entretien avec Sergio Martino (2024, 25’08”, VOST)
« Sans trêve » : Entretien avec Claudio Morabito (2024, 12’51”, VOST)
« La Grande Aventure » avec Antonello Geleng (2024, 53’48”, VOST)
Diaporama d’affiches et photos (2’30”)
Bande-annonce originale (3’52”, VO)

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