Billet de blog 5 novembre 2023

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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Arras 2023 : "Les Gardiens de la formule" de Dragan Bjelogrlic

En 1958, quatre scientifiques yougoslaves qui ont reçu une dose mortelle d'irradiation à l'uranium, sont accueillis par un hôpital français pour être soignés. Le professeur Mathé qui fait des recherches sur la greffe de moelle osseuse, les prend en charge malgré sa méfiance idéologique et politique.

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Illustration 1
Les Gardiens de la formule Cuvari formule de Dragan Bjelogrlic © DR

Film présenté au sein de la sélection « Visions de l'Est » de la 24e édition d'Arras Film Festival 2023 : Les Gardiens de la formule de Dragan Bjelogrlic

Acteur serbe populaire, Dragan Bjelogrlic a débuté dans le cinéma dans les années 1970 et joue d'ailleurs le rôle du « méchant » dans son film Les Gardiens de la formule (Cuvari formule). Plus que la mise en scène, c'est avant tout les messages humanistes que portent les histoires qui l'intéressent. Ainsi, il a trouvé pour son film une histoire méconnue de solidarité au-delà des frontières physiques et idéologiques au cœur des tensions de la Guerre froide. C'est à ce titre que le film porte un véritable espoir compte tenu que la menace de l'arme nucléaire qui plane dans le film abouti à une découverte médicale déterminante pour de nombreuses vies humaines.

L'adaptation du livre de Goran Milasinovic offre le récit des événements hors du commun qui se sont déroulés entre l'ex Yougoslavie et la France de 1958. Dragan Bjelogrlic conserve les véritables noms des protagonistes, des événements et fictionalise ce qui se passe entre les personnages. Il place avant tout son film dans le cadre d'une reconstitution historique rigoureuse où l'accident nucléaire et ses causes ne sont révélés qu'au cours de l'intrigue, dans une série de flashback vécus par l'un des protagonistes, alors que la temporalité présente est une course contre la montre pour sauver par une médecine expérimentale, notamment la greffe de moelle osseuse encore balbutiante, des victimes des recherches nucléaires à des fins militaires et politiques. L'ombre d'Oppenheimer (2023) de Christopher Nolan n'est pas loin mais avec d'autres enjeux propres à l'histoire européenne.

Si les intentions humanistes sont ici louables et l'histoire révélée méconnue passionnante, il manque un véritable dynamisme pour nourrir la mise en scène qui ne décolle jamais en se contentant d'une réalisation des plus classiques où le souci de la reconstitution historique a tendance à étouffer les personnages. Les acteurs et les actrices se contentent ainsi de jouer leurs personnages sans avoir l'opportunité de leur offrir une véritable profondeur sans possibilité de leur offrir des ambiguïtés psychologiques précises.

Le récit ne surprend pas en raison d'un montage classique qui s'intéresse un peu trop aux événements eux-mêmes sans leur offrir une nouvelle interprétation. Ainsi, le contexte sociopolitique de la France et de la Yougoslavie de 1958 est largement invisibilisé à l'écran, car le film est un peu trop confiné à son intrigue principale. De même, le mal être du professeur Mathé qui fuit sa vie privée dans son couple est traité superficiellement alors qu'il y avait matière la aussi à développer les enjeux de son personnage. Au final, le film est bien fragile à trop coller aux faits rigoureusement reconstitués et avec un message d'espoir malgré tout maladroit selon lequel, des recherches criminelles sur l'arme nucléaire ont eu comme conséquence l'application réussie de la greffe de la moelle osseuse. C'est optimiste forcé est certes maladroit mais nourri de bonnes intentions. Il reste au film une opportunité à replonger dans la lecture des enjeux méconnus de l'histoire du siècle dernier.

Les Gardiens de la formule
Cuvari formule
de Dragan Bjelogrlic
Fiction
120 minutes. Serbie, Slovénie, Monténégro, Macédoine du Nord, 2023.
Couleur
Langues originales : français, serbe

Avec : Alexis Manenti (le docteur Mate), Radivoje Bukvic (Dragoslav), Lionel Abelanski (le docteur Jame), Jérémie Laheurte (Schwarzenberg), Olivier Barthélémy (Derval), Predrag 'Miki' Manojlovic (Pavle Savic), Dragan Bjelogrlic (Leka Rankovic), Anne Serra (Odet Dragi), Alisa Radakovic (Rosa), Ognjen Micovic (Zivota), Jovan Jovanovic (Radojko), Maja Campar (Vera), Cédric Appietto (Pabion), Ana Blagojevic (Mrs. Mate), Jean-Louis Coulloc'h (Rejmon), Jean-Baptiste Demarigny (un docteur), Jurij Drevensek (Ales Babnik), Pierre François (un donneur), Jérôme Henry (un donneur), Arnaud Humbert (un docteur), Stanislava Jeftic (Sestra Tijamet), Nikola Kmirnac (Paskal), Joana Knezevic (Sestra Emili), Predrag LukicSara Novak, Nebojsa Rako, Laurent Rouy
Scénario : Dragan Bjelogrlic, Vuk Rsumovic et Ognjen Svilicic, d'après le livre de Goran Milasinovic
Images : Ivan Kostic
Montage : Milena Predic
Musique : Aleksandar Randjelovic
Décors : Jovana Cvetkovic, Jelena Sopic
Costumes : Marina Vukasovic-Medenica
Casting : Ljubimka Pavasovic, Nikola Todorovic
Scripte : Tamara Colja
Société de production : Cobra Film Department
Sociétés de coproduction : Ton Film, Perfo Production, Bitter Frames Production, Film Studio Skopje
Production : Dragan Bjelogrlic, Dragan Solak
Production exécutive : Goran Bjelogrlic, Nena Jankovic, Branislav Milatovic
Coproduction : Miroslav Mogorovic, Ales Pavlin, Tomi Salkovski, Andrej Stritof, Djordje Vojvodic
Production associée : Branko Neskov, Nuno Noivo, Pedro Ribeiro

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