Billet de blog 8 juin 2024

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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"L'Étrange vice de Madame Wardh" de Sergio Martino

Lors de son arrivée à Vienne aux côtés de son époux, Madame Wardh retrouve Jean, une ancienne relation éprouvante reposant sur le BDSM, tandis que dans la ville un tueur en série assassine des femmes armé d'un rasoir.

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Illustration 1
L'Étrange vice de Madame Wardh Lo strano vizio della Signora Wardh de Sergio Martino © Artus Films

Sortie du coffret du combo DVD/Blu-ray : La Trilogie du vice 3 films de Sergio Martino

Toujours à l'affût pour remettre en lumière l'histoire méconnue des ressorts créatifs de la mise en scène du cinéma de genre notamment au cœur de l'industrie cinématographique italienne effervescente des années 1960 et 1970, Artus Films propose au sein de ce coffret intitulé « la trilogie du vice » de mettre en lumière trois giallos réalisés successivement par Sergio Martino avec des acteurs et actrices récurrents devant sa caméra, notamment Edwige Fenech et sa némésis Ivan Rassimov. Il est ainsi fascinant de (re)découvrir dans ces films une réflexion toute personnelle du giallo alors que ces interprètes incarnent des personnages distincts, comme si le cinéaste proposait en sous-lecture implicite une réflexion métacinématographique sur un genre en prise directe avec le contexte sociopolitique de l'Italie des années plombs tout en rappelant sa filiation directe avec trois sources fondamentales d'inspiration que sont Le Chat noir (The Black Cat, 1843) d'Edgar Alan Poe Les Diaboliques (1954) d'Henri-Georges Clouzot et Psychose (Psycho, 1960) d'Alfred Hitchcock.

L'Étrange vice de Madame Wardh (Lo strano vizio della Signora Wardh) rappelle également le dialogue et l'inspiration réciproque nourri avec Dario Argento qui, bien que reconnu dans le cercle des initié es comme le maître du genre, n'en a pas moins été influencé par Sergio Martino, notamment dans cette séquence antonienne (Blow Up) du meurtre-disparition d'une femme dans un parc public. Sans pour autant entrer tout à fait dans la mise en scène baroque de Dario Argento, Sergio Martino n'en est pas moins un inventeur vivement inspiré de prises de vue particulièrement pertinentes pour sonder les fantasmes et les cauchemars de l'héroïne éponyme, traversée entre peur du désir et attraction pour la peur. Celle-ci est ainsi hantée par l'image de son ancien amant Jean dont le prénom français n'est pas sans attester d'une filiation explicite avec le marquis de Sade à travers l'interprétation inspirée au fétichisme assumé d'Ivan Rassimov.

Le scénario met également en lumière un patriarcat aussi répressif que toxique où des hommes développent une solidarité en vue de condamner l'émancipation féminine, un sous-texte sociétal qui n'a pas manqué d'inspirer par la suite Quentin Tarentino notamment dans son diptyque Kill Bill (2003 et 2004).

Illustration 2

L'Étrange vice de Madame Wardh
Lo strano vizio della Signora Wardh
de Sergio Martino
Avec : George Hilton (George Corro), Edwige Fenech (Julie Wardh), Conchita Airoldi (Carol Baxter), Manuel Gill (docteur Harbe), Carlo Alighiero (le commissaire), Ivan Rassimov (Jean), Alberto de Mendoza (Neil Wardh), Bruno Corazzari (le tueur), Brizio Montinaro (l'invité à la fête)
Italie, Espagne, 1971.
Durée : 98 min
Sortie en salles (France) : 14 juin 1972
Sortie France du coffret Blu-ray/DVD : 4 juin 2024
Format : 2,35 – Couleur
Langues : français, italien - Sous-titres : français.
Éditeur : Artus Films

Bonus :
Présentation du film par Emmanuel Le Gagne (2024, 20’21”)
« L’Étrange vice de Monsieur Martino » : entretien avec Sergio Martino (2024, 43’18”, VOST)
« Froid comme un glaçon » : entretien avec Ernesto Gastaldi (2024, 21’56”, VOST)
« Giallo à Vienne » : entretien avec George Hilton et Antonio Bruschini (2024, 18’56”, VOST)
Diaporama d’affiches et photos (2’36”)
Bande-annonce (3’03”, VO)

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