Billet de blog 23 octobre 2024

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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Cinemed 2024 : "Ce n'est pas le moment pour de la pop" d'Amit Vaknin

Une jeune femme part à la recherche d'un appartement à louer à Tel-Aviv, ce qui n'a rien d'évident un jour de commémoration.

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Ce n'est pas le moment pour de la pop d'Amit Vaknin © DR

Film de la compétition court métrage de la 46e édition de Cinemed, festival du cinéma méditerranéen de Montpellier du 18 au 26 octobre 2024 : Ce n'est pas le moment pour de la pop d'Amit Vaknin

Avec un art de la condensation et un regard inattendu pour condenser diverses histoires en un seul personnage, Amit Vaknin a l'audace de rendre visible l'invisible à travers un personnage inédit à l'écran à la vulnérabilité tragicomique.

En quelques heures à peine, la protagoniste passe des bras du foyer dont elle s'extrait, pour un espace extérieur qui n'a rien de forcément accueillant un jour de commémoration à Tel Aviv. Sa course à vélo qui pourrait être légère et le symbole d'une liberté retrouvée par la fluidité de son mouvement chorégraphique dans la ville, est successivement empêchée par un camion de Coca Cola et un arrêt subit de la vie sociale par une sirène stridente qui fend les airs et vient imposer un jour de commémoration avec l'omniprésence de la mort qu'elle rappelle. Là où l'intention politique du jour de commémoration consisterait à unifier le corps d'une nation selon à la fois une commune émotion quant au rapport au deuil, l'héroïne tente de trouver une échappatoire pour vivre autrement son rapport aux autres.

Cela n'a rien de simple et la voilà solennellement invectivée par une voix désincarnée en hors champ lui imposant de subir un ordre social. Au cours de la scène suivante dans l'escalier, le plan fixe qui coupe les têtes des autres personnes attendant comme elle de visiter l'appartement, témoigne avec perspicacité de sa difficulté subjective de faire lien avec son entourage dans une solidarité commune d'appartenir et de partager un même espace. Cette scène d'attente, juste par ce choix explicite de cadrage, met en scène avec une force singulière cette sensation intrinsèque pour ce personnage à ne pas pouvoir trouver la sensation d'appartenir à un même corps social malgré ses nombreuses tentatives maladroites. Même des mannequins ont plus de légitimité dans l'espace public qu'elle qui ne souhaite que conserver son mouvement et dont le vol de son vélo vient encore in fine imposer l'impossibilité pour elle de sortir de son confinement social.

Tourné en septembre 2023, quelques temps seulement avant l'arrivée d'un événement traumatique pour l'ensemble de la société vivant sur une même terre que des gouvernements d'extrême droite tentent de diviser par la violence et le meurtre, l'héroïne d'Amit Vaknin est une vive incarnation d'une vulnérabilité assumée de ces êtres perdus par le poids omniprésent des violences endémiques, luttant pour sortir de cet état de sidération qui empêche la spontanéité d'une nouvelle chorégraphie d'une inscription sociale au monde.

Le film est d'autant plus touchant par la singularité de son ton qu'il réussit à saisir toute la complexité d'une psychologie collective tétanisée où les rapports entre Eros et Thanatos sont encore étroitement liés.

Illustration 2

Ce n'est pas le moment pour de la pop
d'Amit Vaknin
Fiction
14 minutes. Israël, 2024.
Couleur
Langue originale : hébreu

Avec : Yarden Shay (Yael), Aviv Ambar, Iris Haim
Scénario : Amit Vaknin
Images : Shay Ater
Montage : Alon Duchovni
Son : Anita Eidelman
Maquillage : Dan Avigdor
Production : Ron Shetrit
Société de production : The Steve Tisch School of Film and Television

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