Billet de blog 24 octobre 2022

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Cédric Lépine

Critique de cinéma, essais littéraires, littérature jeunesse, sujets de société et environnementaux

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Cinemed 2022 : "Cinco lobitos" d'Alauda Ruíz de Azúa

Amaia est dépassée par la naissance de sa fille d'autant plus qu'elle se retrouve seule à gérer son travail à distance et son nourrisson depuis que son compagnon a accepté une responsabilité professionnelle qui le conduit à s'absenter plusieurs semaines de suite. Elle se réfugie chez ses parents avec de nouvelles difficultés dans une cohabitation difficile.

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Film en compétition de la 44e édition de Cinemed, festival cinéma méditerranéen de Montpellier 2022 : Cinco lobitos d'Alauda Ruíz de Azúa

Ce que l'on a coutume d'appeler un heureux événement dans une forme officielle de parachèvement du féminin selon une idéologie patriarcale de la félicité et du sens de la production, est aussi un événement qui vient bouleverser et d'autant mieux interroger, le fragile équilibre d'une construction familiale. C'est ainsi que le film commence avec une jeune femme défaite et les pleurs d'un nouveau-né dont la fin de la fusion maternelle au sein de son existence utérine n'a pas fini de l'interroger dans son rapport au monde.

Illustration 1
Cinco lobitos d'Alauda Ruíz de Azúa © DR

Ce n'est là que le préambule d'une histoire de famille qui vient interroger la place de chaque membre d'une génération à l'autre à chaque nouvelle naissance. En l'occurrence, le film débute dans l'intimité d'un jeune couple prêt à exploser avec une mauvaise gestion de la charge mentale où le jeune père n'a finalement pas de complexe à laisser sa jeune compagne à gérer toute seule l'angoissante réalité de se sentir déficient à naître parents. C'est alors que la problématique de la vitalité du couple parental se retrouve interrogé par l'intermédiaire d'autres personnages : ceux qui ont derrière eux plusieurs décennies d'expérience, à savoir les parents d'Amaia.

Ainsi, se révèle l'intelligence d'un scénario capable d'insérer plusieurs couches d'analyses dans ce portrait familial qui se concentre notamment sur trois personnages, une jeune mère et ses deux parents, sous la ligne directrice forte d'une transmission féminine intergénérationnelle où les attitudes, les modes de fonctionnement et les erreurs douloureuses ont tendance malheureusement à se répéter, faute de communication et en raison du poids inconscient de la transmission familiale.

Autour de cette écriture scénaristique finement ciselée, la réalisatrice a choisi des interprètes qui savent pleinement incarner des rôles complexes habités par diverses histoires qui ont beau rester hors-champs, font se mouvoir les personnages dans leurs interactions. C'est aussi la méthode Cassavetes qui filme au plus près ses interprètes pour saisir des émotions qui en disent plus long que toute l'élaboration d'un décor et de mouvements complexes de caméras. Les corps filmés au plus près dans des cadres restreints révèlent ainsi les histoires de famille non résolues dans d'autres époques. Car l'intrigue se concentre progressivement au fil des séquences dans une histoire intergénérationnelle ininterrompue entre une mère et une fille. Dès lors, devenir mère est une invitation à faire le deuil d'un rapport filial privilégié pour naître à son tour de manière plus ou moins autonome.

Alauda Ruíz de Azúa prend de la distance avec son contexte sociohistorique pour se concentrer sur les liens familiaux comme détenteurs de vérité d'individus dans leurs fragilités assumées. On retrouve dans cette démarche la réalité extradiégétique du confinement où des membres d'une famille se sont retrouvés contraints à cohabiter et ainsi interroger dès lors leur propre place dans leur famille.

Cinco lobitos
d'Alauda Ruíz de Azúa
Fiction
104 minutes. Espagne, 2022.
Couleur
Langues originales : espagnol, anglais, basque

Avec : Laia Costa (Amaia), Susi Sánchez (Begoña), Ramón Barea (Koldo), Mikel Bustamante (Javi), José Ramón Soroiz (Iñaki), Asier Valdestilla García (Eneko), Justi Larrinaga (Miren), Isidoro Fernández (Antxón), Gloria Helguera (la pêcheuse), Carmen Berbaola (la poissonnière), Lorena López (la mère au parc de Madrid), Elena Sáenz (l'infirmière à la réception), Ana Isabel Martínez (l'infirmière aux urgences), Anuska Pernia Sainz (l'infirmière au poste opératoire), Nerea Arriola (l'infirmière au poste opératoire), Arantxa Matías (l'infirmière auxiliaire), Leire Ucha (l'infirmière auxiliaire), Amber Shana Williams (la voix de Charlotte), Juantxo Etxeberria (le prêtre), Juana Lor Saras (la touriste), Aitor Ispuzua (l'employé des pompes funèbres), Óscar Zulueta (l'employé des pompes funèbres), Adela de Vial (Ione à 1 mois), Óliver González (Ione à 1 mois), Ángela Nieto-Márquez (Ione à 4 mois), Teresa Nieto-Márquez (Ione à 4 mois), Ghia Morán Rojas (Ione à 4 mois), Mia Morán Rojas (Ione à 4 mois), Alaine Otero Lozano (Ione à 1 mois), Alberto Nieto-Márquez (l'enfant du parc)
Scénario : Alauda Ruíz de Azúa
Images : Jon D. Domínguez
Montage : Andrés Gil
Musique : Aránzazu Calleja
1er assistant réalisateur : Martin Bustos
Directrice artistique : Mónica Ausín
Maquillage : Ainhoa Eskisabel
Costumes : Ana Martínez Fesser
Casting : Txabe Atxa, Florencia Inés González
Scripte : Patricia Muñoz
Production : Buena Pinta Media, Comunidad de Madrid, Encanta Films, Euskal Irrati Telebista (EiTB), Instituto de la Cinematografía y de las Artes Audiovisuales (ICAA), Radio Televisión Española (RTVE), Sayaka Producciones Audiovisuales
Producteurs exécutifs : Manuel Calvo, Marisa Fernández Armenteros, Sandra Hermida, Nahikari Ipiña

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