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Film de la rétrospective consacrée au cinéaste Rodrigo Sorogoyen de la 46e édition de Cinemed, festival du cinéma méditerranéen de Montpellier du 20 au 26 octobre 2024 : Stockholm de Rodrigo Sorogoyen
Stockholm (2013) est le premier long métrage que Rodrigo Sorogoyen réalise seul et qui est resté inédit en salle après avoir été découvert tout d'abord en France au festival Cinespaña de Toulouse en septembre 2013 puis au festival Cinemed le mois suivant, en un temps démocratique où les festivals n'imposaient pas encore l'obligation d'une exclusivité. La projection de ce film à Montpellier s'inscrit dans le cadre d'une rétrospective intégrale des œuvres filmiques du cinéaste à l'exception de 8 citas (2008) coréalisé avec Peris Romano.
Après avoir débuté à la télévision, Stockholm s'affirme comme une entrée forte dans le cinéma par un sens de l'épure au profit d'une rencontre le temps d'une nuit entre un garçon et une fille et les conséquences de celle-ci au petit matin. L'intrigue repose sur ces deux parties révélatrices de la mise en scène au cœur d'une rencontre amoureuse, avec des jeux de séduction où le charme et le mensonge font partie du processus plus ou moins implicite. Avec un montage particulièrement dynamique privilégiant déjà chez Rodrigo Sorogoyen les plans-séquences, le cinéaste analyse avec autant de maturité dans l'analyse psychologique de ses protagonistes que de maestria dans les choix de mise en scène, une relation éphémère de couple qui sera pourtant déterminante pour le reste de la vie de ceux-ci. Le film doit beaucoup à une écriture scénaristique finement ciselée avec une grande place accordée aux dialogues comme enjeu central de l'intrigue et de la prise de pouvoir progressive. Le cinéaste commence ici une collaboration particulièrement fructive avec Isabel Peña qui n'a d'ailleurs jamais cessé depuis.
Quelques années avant le déferlement #MeToo, Stockholm dénonce les stratégies de prédation dans les rapports de séduction aux conséquences dramatiques, où le désir sexuel se trouve au fond dissimulé par une tradition du dialogue amoureux qui remonte jusqu'aux troubadours et dont la finalité est la conquête unilatérale qui brouille la conscience claire du désir et du consentement afin de conduire à la prise de possession d'une intimité sexuelle. Le syndrôme de Stockholm, qui parle de l'empathie de la victime pour son bourreau, permet ici de proposer une lecture pertinente des enjeux d'emprise dans une relation séductrice de prédation.
La première partie du film est à lire à travers le prisme de la seconde partie pour comprendre avec une rare dextérité les mécanismes particulièrement pervers de la prédation amoureuse masculine. Un film dont on ne ressort pas indemne avec deux interprétations éminemment convaincantes.
Stockholm
de Rodrigo Sorogoyen
Fiction
92 minutes. Espagne, 2013.
Couleur
Langue originale : espagnol
Avec : Javier Pereira (lui), Aura Garrido (elle), Jess Caba (un ami), Susana Abaitua (la première amie), Lorena Mateo (la deuxième amie), Miriam Marco (la troisième amie), Helena Sanchis-Guarner (une fille), Javier Santiago (un garçon)
Scénario : Rodrigo Sorogoyen, Isabel Peña
Images : Alejandro de Pablo
Montage : Alberto del Campo
1ers assistants réalisateurs : Juan Carlevaris, Carlos Navarro
2nd assistant réalisateur : Sergio Albarrán
3e assistant réalisateur : Beatriu Vallès Jimeno
Son : Raúl Valdés
Décors : Juan Divassón
Maquillage et coiffure : Lucía Pando
Costumes : Lorena Puerto
Superviseur des effets visuels : Alberto Ortega
Scripte : Anna Peris Lluch
Production : María Jesús del Amo, Alberto del Campo, Jon Díez, Álex Montoya
Sociétés de production : Caballo Films, Tourmalet Films, Morituri