Le Cinéma Quinqui d'Eloy de la Iglesia

Sortie du coffret combo Blu-ray + DVD + livre : Le Cinéma Quinqui d'Eloy de la Iglesia

Après avoir édité en avril 2022 Cannibal Man - La Semaine d'un assassin (La Semana del asesino, 1972), Artus Films poursuit sa mise en valeur d'un cinéaste espagnol incontournable en sortant en un même coffret trois films réalisés consécutivement par Eloy de la Iglesia et qui ont pour point commun d'être associés au genre quinqui. Pour les cinéphiles curieux, ce coffret qui est autant une déclaration d'amour au cinéaste Eloy de la Iglesia qu'au genre quinqui, est une merveilleuse édition pour s'immerger dans le cinéma espagnol de la transition démocratique en ce début des années 1980.

Les trois films présentés dans ce coffret en DVD et en Blu-ray à la suite d'un travail de restauration effectué avec soin comprennent plusieurs heures de bonus qui permettent de décortiquer le genre quinqui comme phénomène cinématographique aussi bien que sociologique, sans oublier tout un livret de près de 100 pages. Il en résulte la possibilité d'un va-et-vient permanent entre les informations extrafilmiques et les films eux-mêmes. En effet, les trois films d'Eloy de la Iglesia sont d'autant plus riches qu'ils s'insèrent dans une explication précise et cette dernière prend tout son sens avec les films.

Le quinqui désigne le jeune délinquant espagnol qui possède un lien fort d'empathie avec le public, notamment lorsque l'une de ses figures a été considérée comme une expression de révolte par rapport à l'ordre imposé sous la dictature franquiste. Conséquemment, le cinéma de genre quinqui fait appel à des acteurs non professionnels qui jouent leur propre rôle ou presque à l'écran, dans des situations difficiles et périlleuses, entre dépendances aux drogues, les commerces illicites pour survivre face à des situations économiques précaires, des scènes érotiques avec les corps dénudés des jeunes. D'ailleurs, le cinéma d'Eloy de la Iglesia utilise la sexualité pour la lier étroitement au politique. Ainsi, dans Colegas, c'est afin de réaliser clandestinement un avortement qui n'est pas encore autorisé par la loi en Espagne, que deux amis sont amenés à suivre la voix de l'argent gagné en dehors du respect de la loi. Sous les traits assumés du cinéma de genre, le réalisateur démontre ainsi les conséquences de la pénalisation de l'avortement dans une société.

Dans Colegas comme dans ses deux Pico, Eloy de la Iglesia développe son intrigue autour de jeunes gens qui vont entrer dans la délinquance comme un moyen implicite de ne pas suivre le même chemin que leurs parents. Il en résulte des conflits familiaux qui sont le fil conducteur des trois films et alors que les personnages féminins sont souvent en retrait, la confrontation entre Rosario et sa mère dans Colegas est particulièrement savoureuse dans son évolution vers l'émancipation de son personnage. C'est pourquoi les scénarios de ces films sont écrits avec soin et doivent peu au hasard, même s'il s'agit de production de genre répondant à un catalogue précis de codes à respecter pour satisfaire le public. À cet égard, Pico fut le film qui rencontra le plus grand succès public parmi les films quinquis et qui est devenu un film culte encore diffusé à la télévision espagnole. Le cinéaste en a profité dans la suite de ce film pour développer la destinée de son protagoniste interprété par son acteur fétiche et muse José Luis Manzano, qui passe par une succession de souffrances qui fait de lui un martyr victime de rencontres peu recommandables.

Pico se situe également de manière non anodine à Bilbao dans le contexte du conflit sanglant entre l'ETA et le gouvernement espagnol avec notamment quelques révélations dans Pico 2 où un ancien prisonnier est engagé pour assassiner des membres de l'ETA avec l'assentiment des autorités espagnoles. Le scénario se permet ainsi de nombreuses références politiques sur le contexte social, tout comme le premier Pico met en scène l'utopie de la réunion entre un père de la garde civile nostalgique de Franco et un député socialiste pour sauver leurs fils, devenus amis mais aussi victimes de la dépendance à l'héroïne. Il découle de ces films de véritables radiographies de leur époque et la pertinence d'un cinéaste dans sa manière de les mettre en scène au profit de la réception du plus large public.

Colegas
d'Eloy de la Iglesia
Avec : Antonio Flores (Antonio), Rosario Flores (Rosario), José Luis Manzano (José), José Manuel Cervino (le père d'Antonio et Rosario), Queta Ariel (Ilona), Francisco Casares, Isabel Perales, José Luis Fernández Eguia « El Pirri », Ricardo Márquez, Luis Romero, Omar Butler, Tony Valento, Antonio Betancourt, Bárbara Moya, Lou Belliard
Espagne – 1982.
Durée : 117 min
Sortie en salles (France) : inédit

L'Enfer de la drogue
El Pico
d'Eloy de la Iglesia
Avec : José Luis Manzano (Paco), José Manuel Cervino (Evaristo Torrecuadrada), Luis Iriondo (Martín Aramendía), Enrique San Francisco (Mikel Orbea), Andrea Albani (Betty), Queta Ariel (Eulalia), Marta Molins (Pilar), Pedro Nieva Parola (le lieutenant Alcántara), Alfred Lucchetti (le colonel), Guillermo Reinlein (Juanra Ramírez), Marta Pérez Ferrándiz (l'ami de Betty)
Espagne – 1983.
Durée : 110 min
Sortie en salles (France) : inédit

L'Enfer de la drogue 2
El Pico 2
d'Eloy de la Iglesia
Avec : José Luis Manzano (Paco), Fernando Guillén (Evaristo Torrecuadrada), Andrea Albani (Betty), Jaume Valls (El Lehendakari), José Luis Fernández 'Pirri' (El Pirri), Valentín Paredes (El Tejas), Gracita Morales (Adela), Fermín Cabal (Miguel Caballero), Paloma Alaez (Esperanza), Tony Valento (Fernando), Ramón Repáraz (le commissaire), Alfred Lucchetti (le colonel), Guillermo Montesinos, Hilda Fuchs, Pedro Nieva Parola, Fernando Marín, José María Escuer, Agustín González, Rafaela Aparicio, Sara de Arcos, Manuel Ayuso, Alfonso Godá, Àngel Solà, Juan Sala, Luis Romero, Antonio Betancourt, José A. Blesa, Antonio Calzas, Guillermo Carmona, Joaquín Carmona, Florencio Castejón, Ángel García, Chema Gil, Ramón Goyanes, Janfri Topera, José Carlos Lancho, Domingo López, José Javier Mangado
Espagne – 1984.
Durée : 120 min
Sortie en salles (France) : inédit

Sortie France du coffret combo Blu-ray + DVD + livre : 5 septembre 2023
Couleur
Langue : espagnol - Sous-titres : français.
Éditeur : Artus Films
Bonus :
le livret « Cine Quinqui : les loups sont dans la rue » de David Didelot (98 pages)

DVD et Blu-ray de Colegas :
« Le Cinéma selon Eloy de la Iglesia » par Laureano Montero et Maxime Breysse (2023, 37’09”)
Bande-annonce (2’27”, VOST)
DVD et Blu-ray de  El Pico :
« Du sang dans les rues » avec Mary Cuesta et Tom Whittaker (2021, 44’45”, VOST)
Diaporama d’affiches et photos (1’12”)
Bande-annonce (3’04”, VOST)
DVD et Blu-ray de El Pico 2 :
« Le Cinéma Quinqui » par Laureano Montero et Maxime Breysse (2023, 38’13”)
Bande-annonce (2’49”, VOST)