Sortie nationale (France) du 26 avril 2023 : San Babila : un crime inutile de Carlo Lizzani
Ce film réalisé par Carlo Lizzani bénéficie d'une nouvelle mise en avant autour de la ressortie en version restaurée 4 K de 3 films parmi les plus saisissants de ce cinéaste italien qui gagne à être redécouvert : San Babila : un crime inutile (San Babila ore 20: un delitto inutile, 1976), Storie di vita e malavita (1975) et La Chronique des pauvres amants (Cronache di poveri amanti, 1954).

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Carlo Lizzani a débuté au cœur du cinéma néoréaliste italien en tant que coscénariste de Roberto Rossellini sur Allemagne année zéro (Germania anno zero, 1948) ainsi que sur Riz amer (Riso amaro, 1949) de Giuseppe De Santis. C'est fort de cette expérience et de ses convictions au sein du parti communiste qu'il débute dans la réalisation avec la sortie de son premier long métrage Achtung! Banditi! (1951). Au mitan des années 1970 ensanglantées par un contexte de tension politique et sociale extrême, Carlo Lizzani s'empare d'un fait divers (l'assassinat d'un jeune par cinq néofascistes) pour l'objet de son intrigue dans un thriller urbain politique dont les protagonistes sont des jeunes néo-fascistes qui se revendiquent comme tels.
Pour conserver la force du propos dans une démarche à l'esthétique documentaire néoréaliste, Carlo Lizzani fait jouer des acteurs professionnels dans les rôles principaux, à l'exception de Brigitte Skay dans le rôle de la jeune ingénue écervelée et violée par l'un des membres du groupe. Ce dernier personnage qui fait sortir parfois le film de la tragédie dans des moments de dérision par son ingénuité, est là aussi pour rappeler la conception toute misogyne des femmes de groupes de jeunes hommes frustrés qui s'exercent au tir sur des cibles représentant des corps de femmes nues. Les séquences qui s'enchaînent tout au long du film sont malaisantes parce qu'elles invitent à découvrir une journée de ce groupe fasciste sans aucune complaisante à l'égard de situations sordides.
Carlo Lizzani s'attache en particulier à décrire non seulement les exactions en groupe mais encore l'intimité de ces jeunes dans le contexte peu épanouissant de leur milieu familial, de la mère fusionnelle quasi incestueuse au patriarche gauchophobe dominateur. La description est efficace et rappelle un contexte social de violence de groupuscules néofascistes protégés par une élite politique qui prône dès lors la non intervention policière. Réalisé avec une économie de moyens qui rappelle l'héritage néoréaliste, le film est entièrement dévoué à l'efficacité de son propos pour dénoncer le retour de la fascisation d'une partie de la société italienne des années 1970. Un véritable film coup de poing qui a aussi pour atout rétrospectif de questionner le regain d'intérêt contemporain pour l'attrait fasciste et la criminalisation des mouvements de gauche dans la France de cette nouvelle décennie 2020.
San Babila : un crime inutile
San Babila ore 20: un delitto inutile
de Carlo Lizzani
Fiction
100 minutes. Italie, 1976.
Couleur
Langue originale (italien
Avec : Daniele Asti (Franco), Giuliano Cesareo (Michele "Miki" Castiglioni), Pietro Brambilla (Fabrizio), Pietro Giannuso (Alfredo), Brigitte Skay (Lalla), Grazia Baccari (la petite amie de Paolo), Gilberto Squizzato (Paolo), Franca Mantelli (la mère de Franco), Paola Faloja (la mère de Michele), Vittorio Pinelli (l'agent de police)
Scénario : Mino Giarda, Ugo Pirro et Carlo Lizzani
Images : Piergiorgio Pozzi
Montage : Franco Fraticelli
Musique : Ennio Morricone
Son : Domenico Pasquadibisceglie
Assistants réalisateur : Claudio Lazzaro, Gilberto Squizzato
Direction artistique : Pier Luigi Basile
Maquillage : Silvana Petri
Costumes : Dada Saligeri, Serenilla Staccioli
Scripte : Vittoria Vigorelli
Production : Carlo Maietto et Adelina Tattilo
Société de production : PTA (Produzioni Thousand Associate)
Distributeur (France) : Les Films du Camélia
Sortie salles (France) : 26 avril 2023