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Jean Guilloré vit avec Diogène, son chien. Tout sourire, il me lance «vas-y, pose-ta question»! J'en ai bien une brouette de questions, à commencer par: mais qui est donc cet auteur de romans pour la jeunesse, scénariste, journaliste, grande gueule, élevé à l'école des cyniques qui bascule vers la trentaine dans la réalisation de films X et qui endosse le costume du pornographe John B.Root? Je sens bien que le parcours est pour le moins atypique, voire délicat. Je me lance avec une question à tiroir: le cinéma pornographique peut-il être considéré comme un cinéma militant?
Ah! On revient un peu en arrière, en 75, des «fils» de 68 auraient voulu choquer le bourgeois en remplissant les salles de cinéma d'un nouveau genre, un cinéma pour adulte, libre, libéré de la morale ambiante, comme il existera bientôt des bandes dessinées, des revues à thèmes; grands reportages et petites culottes, des Hara-Kiri et des Fluide Glacial... seulement voilà, ça a tellement bien marché qu'une majorité de salles se sont retrouvées avec des affiches et des titres qui devenaient difficiles à traduire aux plus jeunes...
Six mois plus tard, une «commission du classement des œuvres cinématographiques», liée au ministère de la culture, déposait un texte qui enterrait quasiment tout espoir de voir le genre se développer. Ils ont coupé les budgets, «ixé» et taxé les films.
Pour Jean Guilloré comme pour John B. Root, c'en était fini des velléités artistiques, d'un «schéma économique» viable, et d'un certain âge d'or du genre avec comme référence Kikoïne, Lansac, Francis Leroi et le célèbre Damiano et son Gorge profonde.
Alors en quoi ce cinéma est-il militant? D'après Jean G, il se pourrait bien qu'un cinéma adulte et «maîtrisé» dans sa diffusion soit un facteur d'apaisement et de développement de la libido chez beaucoup d'entre nous. Il se pourrait aussi qu'un cinéma adulte qui met en scène des phantasmes puisse aider au bon équilibre mental...
Etrangement le sexe fait peur alors que la violence fascine!
Dès les premières images, John B impose l'utilisation du préservatif, ça fera même école dans le milieu. Certaines chaînes qui diffusent du porno n'accepteront plus les ébats non protégés. John B insiste sur le fait que dans ses films, jamais la femme ne passe pour une victime, c'est elle qui décide, toujours. Et de râler contre ceux qui font du documentaire animalier!
Pour Jean G, il est indispensable d'ajouter du sens et de l'écriture au porno. Idéalement il faudrait que libido, intellect, et affect soient réunis.
Jean-John a écrit une lettre ouverte au ministre de la culture pour défendre son cinéma en 2002 : «Lettre ouverte d'un pornographe consterné», parue dans Libé... depuis, John B a mis de l'eau dans son vin.
Nous avons visionné son excellent Teaser N°2 (visible par tous) de «Mangez-moi», son dernier film.
J'ai photographié Jean G, en t-shirt noir de Miossec, sur un mur blanc. Oh, un 20 mm, t'es vache !
On est sorti, Diogène le chien avait envie de pisser.