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Construction de savoirs collectifs

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Billet de blog 20 avril 2009

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Du remplissage à la plénitude

( En prolongement de l'article d'Anne Guérin-Castell, mais aussi du commentaire de C. Malbos) Dans leur marche compulsive vers le progrès, les sociétés de consommation se sont engagées dans une étrange frénésie accumulative, que l'on serait tenté d'associer plus au manque qu'à l'abondance ...

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

( En prolongement de l'article d'Anne Guérin-Castell, mais aussi du commentaire de C. Malbos)

Dans leur marche compulsive vers le progrès, les sociétés de consommation se sont engagées dans une étrange frénésie accumulative, que l'on serait tenté d'associer plus au manque qu'à l'abondance ...

Ce remplissage m'apparaît à la fois comme une séquelle des sociétés traditionnelles et une caractéristique propre aux sociétés modernes qui leur ont succédé.

Il y a d'abord cette accumulation de denrées et d'objets, vestige d'habitudes ancestrales dans un monde où primait la rareté, mais aussi privilège nouveau d'une société où la diversité et la liberté se sont accrus. Car si les réfrigérateurs et les placards sont «surapprovisionnés», si les rayonnages sont pleins, c'est aussi que l'on veut s'assurer à chaque instant une variété, une liberté de choix qui ne se réduise pas à une seule alternative : pâtes ou riz ? Mozart ou Messian ?

Il y a ensuite cette accumulation de sons, ce flot de paroles et de musique qui accompagne l'individu du matin au soir, même dans ses déplacements. La musique d'ambiance, la présence continue d'un animateur radio ou télé, le portable qui lie aux proches comme un cordon ombilical, pallient la solitude dans un monde où les solidarités familiales, collectives, tendent à régresser face à l'individualisme. Ils évitent le silence, la confrontation la plus dure, celle avec soi-même.

Et puis, contrairement aux sociétés statiques et refermées sur elles-mêmes d'antan, les sociétés modernes en mouvement, toujours plus ouvertes sur l'extérieur, poussent également à l'accumulation des activités.

Il est ainsi très paradoxal qu'à l'époque ou l'espérance de vie et le temps libre ont considérablement augmenté, ce nouveau rapport au temps et à l'espace donne l'impression d'avoir une vie plus courte tant il reste de choses à découvrir . Alors on enchaîne les activités et les loisirs ne laissent pas plus de répit que le travail. On n'hésite pas à faire plusieurs choses à la fois pour gagner encore du temps, la productivité devenant une valeur en soi.

Ce remplissage vient-il combler le vide des existences, la béance des âmes, en apportant un ersatz de bonheur ?

Je ne le pense pas. Certes, il évite de se retrouver face à soi-même, mais il traduit plus, à mon sens, la peur du plein que celle du vide. C'est le trop-plein des désirs et des déceptions, des espoirs et des blessures que l'on cherche à dériver, à noyer. Il traduit également une incapacité à faire le vide, une inaptitude à l'humilité sans doute favorisée par la mise en avant excessive des ego.

Et si l'on peut atteindre la sérénité, ce n'est pas par le remplissage, mais par la plénitude qui en est l'opposé.

Car atteindre la plénitude, c'est parvenir à faire le vide en soi, c'est accepter de s'effacer et d'arrêter le cours de sa pensée. C'est marcher et se fondre dans sa respiration, c'est se diluer dans l'azur du ciel ou épouser la forme d'un nuage livré au souffle du vent. C'est faire d'un instant une minute d'éternité.

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