Jean-Baptiste Robin - Cercles réfléchissants - Grand Prix Lycéen des Compositeurs
La scène se passe dans la salle de spectacle du Lycée Alain-Fournier, à Bourges. Situé dans les faubourgs au nord de la ville, ce lycée n'est pas un établissement spécialement favorisé, même si on y trouve des classes prépas ainsi qu'un large pôle artistique allant du théâtre aux arts plastiques, en passant par la musique. Il fait pourtant partie des 91 établissements engagés dans l'élection du Grand Prix Lycéen des Compositeurs. Principalement grâce au dynamisme de son unique professeure de musique, Delphine Bordat.
Né il y a douze ans, ce Grand Prix est une initiative de la Lettre du Musicien et de l'association Musique nouvelle en liberté visant à sensibiliser les lycéens à la musique contemporaine. Le principe est assez simple : une petite dizaine de compositeurs, ayant eu une sortie discographique dans l'année, sont sélectionnés par un jury de professionnels, ainsi que, pour chacun d'eux, une pièce particulière — représentative de son œuvre et/ou la mieux à même de faire entrer de jeunes oreilles dans son univers musical. Durant l'année, les professeurs de musique des 91 établissements font donc écouter les divers extraits à leurs élèves, en les commentant et en les enrichissant éventuellement d'un aperçu sur ce qu'ils portent en eux d'héritage de l'histoire de la musique. Puis entre janvier et mars, les lycéens votent — un vote par tête, chacun d'eux pouvant voter pour deux compositeurs différents.
Cette année, les candidats sont Mark André (né en 1964), Pascal Dusapin (né en 1955), Jean-Luc Hervé (né en 1960), Thierry Machuel (né en 1962), Thierry Pécou (né en 1965), Jean-Baptiste Robin (né en 1976) et Oscar Strasnoy (né en 1970) et les résultats seront révélés le 17 mars, lors d'un journée spéciale au théâtre du Chatelet, en présence de la plupart des candidats, et au cours de laquelle sera créée une œuvre commandée au lauréat 2010 : Benjamin de la Fuente. De nombreux élèves ayant participé au vote assisteront bien sûr à l'événement.

(Photo : Jean-Baptiste Robin, à droite, jouant pour les élèves du Lycée Alain-Fournier de Bourges)
Dans l'intervalle, certains lycées auront également la chance de recevoir un compositeur de la sélection — si du moins leurs emplois du temps respectifs s'y prêtent : certains compositeurs font ainsi une dizaine, voire une quinzaine de visites en quelques mois ! C'est le cas de Jean-Baptiste Robin, que nous avons suivi lors de la dernière étape de sa tournée.
Le voilà donc justement devant la cinquantaine d'élèves des diverses sections musicales du Lycée Alain-Fournier de Bourges. Parmi eux, des secondes explorant les Arts du son, des élèves de l'option musique facultative (coefficient 2 au bac) ou de l'option obligatoire, liée au bac L (avec seulement quatre élèves sur le lycée entier pour cette option coefficient 6 à l'examen).
Le premier contact n'est pas des plus faciles. Non pas qu'on sente une quelconque hostilité de la part des jeunes, mais ils sont indéniablement intimidés, sinon absents. Le compositeur décide donc de briser la glace en parlant de l'orgue : son instrument, mais aussi l'instrument pour lequel est écrit Cercles réfléchissants, son œuvre en compétition pour le Grand Prix Lycéen des Compositeurs...
Puis, jouant le jeu du concours, Jean-Baptiste Robin rentre dans le vif du sujet. Après l'avoir écoutée, par courts extraits puis in extenso - sur la pauvre chaîne Hi-Fi du lycée, à laquelle il ne reste plus qu'un malheureux haut-parleur -, il se lance dans une analyse succincte de sa pièce. Son discours n'a rien de celui d'un spécialiste : même s'il se refuse à l'appauvrir, il tente là une vulgarisation bienvenue. Qui, hélas, n'a pas l'air de toucher tous les élèves : comme nous le dira plus tard la professeure Delphine Bordat, le niveau général n'est pas des plus satisfaisants — tout bêtement parce que, avoue-t-elle sans plaisir, mais sans découragement non plus, ses cours relèvent la plupart du temps plus du social que de la pédagogie. Émaillant son exposé de discrètes références à l'univers sonore des adolescents (le hard rock - certains élèves arborent fièrement des T-Shirt Iron Maiden -, mais aussi le cinéma et autres cultures du divertissement qui leur sont familières), le compositeur tâche tant bien que mal d'évoquer quelques aspects de son métier et de son travail du son et de l'acoustique. Comme, par exemple : à quoi sert la réverbération acoustique et comment l'exploiter ?
Ces deux heures d'exposé semblent à la fois bien courtes et bien longues. Et la question demeure : si l'initiative se doit d'être louée, que restera-t-il aux jeunes étudiants de cette rencontre ? Et, plus généralement, de la musique contemporaine ? Ce genre de rencontre ne devrait-elle pas être la règle et non l'exception, dans un système scolaire viable ?
Entretien avec Delphine Bordat, professeure de musique au Lycée Alain-Fournier de Bourges
Merci à Delphine Bordat, aux élèves du Lycée Alain-Fournier de Bourges, à Jean-Baptiste Robin et à Frédérique Triquet...
Remise des prix au Théâtre du Chatelet, le 17 mars 2011, à partir de 9h.