La réunion tant attendue par les libraires et appréhendée par le comité d'organisation s'est déroulée le 5 mai. Tout a commencé par la remise de la liste mise à jour des auteurs confirmés aux libraires. Ces derniers en avaient déjà reçu une copie quelques jours avant, afin de préparer leur sélection. Pour faciliter l'organisation, le choix se fait par éditeurs et non par auteurs. "Une répartition auteur par auteur prendrait un temps fou et poserait des difficultés logistiques", explique Marie Hélène Caroff, chargée de mission de l'Eté du livre, "En plus, au sein d'une maison d'édition les auteurs se connaissent et ont l'habitude d'être ensemble". Du coup, armés de leur liste d'éditeurs, les libraires se préparent à la bataille.
C'est tour à tour que les libraires choisissent leurs éditeurs fétiches. "Le système du tour de table fait que les choses se passent bien", précise Richard Bance, membre du comité d'organisation, "C'est celui qui reçoit le prix de l'Eté du livre -qui tourne chaque année- qui ouvre le feu". Cafés et croissants sont déjà loin. L'esprit vif et concentré, les libraires s'affrontent. Étonnamment, l'ambiance est plutôt bon enfant entre les représentants des trois librairies messines partenaires de l'opération. Jacques Foures de la librairie Geronimo plaisante en disant que "la Fnac a pris Stock, tout s'effondre" puis annonce qu'il prend Don Quichotte car ce matin il a entendu un extrait de la comédie homonyme de Jules Massenet. Malgré cette bonne humeur apparente, les libraires ne perdent pas le nord. Recroquevillés en duo sur leur liste, tous chuchotent, calculent et comparent. Après trois tours de table, le choix devient plus difficile et la réflexion plus longue. Simone Hisler rappelle alors gentiment le responsable de Géronimo qui traine un peu. "Frère Jacques, t'endors pas!". Et là, trouvaille de dernière minute, la maison d'édition le Seuil avait été oubliée des sélections, Jacques Foures, dont c'était le tour de parler, a donc sauté dessus.
Quelques ressentis ressortent peu à peu par rapport au choix des auteurs. Le comité d'organisation exerce en effet une réelle sélection des écrivains présents lors du festival, ce qui n'est pas du goût de tous les libraires. Simone Hisler aimerait plus de best-sellers et déplore la présence de certains auteurs. "Ce livre on n'en a vendu qu'un, c'est bien la preuve qu'il n'intéresse pas les gens...". La question de l'argent fait ensuite surface. Mme Hisler rappelle que "les libraires ne viennent pas pour des queues de prune". Selon elle, les ventes baissent depuis deux ans et la rentabilité n'est pas évidente. "Il faut louer une camionnette, un chauffeur, payé une dizaine de personnes... On adore être au milieu des auteurs, mais à la fin de l'histoire..." Pour Jacques Foures, le thème retenu cette année (Modernité... Et alors?) n'est pas compris par tous les éditeurs, mais si les choses se compliquent c'est en raison de "l'environnement du livre qui est mauvais et des éditeurs qui font la gueule". Mathieu Barville de la Fnac confirme cet état de fait. "Vu que ça va mal, les éditeurs ont du mal à débourser l'argent".
Après cet aparté, la sélection continue car Richard Bance, membre du comité, rappelle qu'il reste encore des "orphelins". Au bout d'une heure trente, chaque maison d'édition a trouvé preneur sur un stand, et la sélection semble faire consensus. "C'était une bonne réunion" affirme le directeur de Geronimo. Commentaire acquiescé par le responsable de la Fnac qui rajoute "Ça c'est mieux passé que je le pensais".