Si l’Europe n’a pas envie de copier le célèbre «modèle allemand» en ce qui concerne les domaines sociaux et économiques, il serait grand temps de prendre exemple sur le voisin outre-Rhin dans le domaine de la transition énergétique. Tandis que la France s’agrippe encore au nucléaire (malgré tout ce que l’on sait aujourd’hui sur les coûts associés au démantelement et au stockage des déchêts nucléaires à long terme, sans parler des dangers de cette technologie mal maîtrisée), l’Allemagne est arrivé au stade où les discussions ne tournent plus autour de la question si oui ou non, on s’engage pour les énergies renouvelables, mais uniquement autour de la meilleure réalisation de cette transition énérgétique. La France, malheureusement, est à la traine. Si aujourd’hui, les Français ne payent pas cher l’énergie (par rapport á d’autres pays européens), demain, ils payeront d’autant plus cher.

Lors des négotiations en vue de la nouvelle coalition gouvernementale, la CDU/CSU et le SPD approchent leurs positions. Ainsi, ils sont d’accord pour réduire la part des éoliennes en «offshore», mais aussi sur terre, ils veulent abolir les prix garantis pour les producteurs d’énergies renouvelables, mais en même temps, ils vont augmenter la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique allemand à 40% d’ici l’an 2020 et à 75% à l’horizon 2030.
La différence de l’ambition en matière de politique énergétique entre la France et l’Allemagne est de taille. Pendant que le gouvernement français peine à réaliser sa promesse de fermer d’ici 2017 une seule pauvre centrale nucléaire vétuste à Fessenheim (et on a du mal à croire que cette fermeture intervienne vraiment sous le Président Hollande...), l’Allemagne se rend indépendante du pétrole, du charbon et du nucléaire. 40% d'énergies renouvelables en 2020, 75% en 2030 - on ne parle plus du tout d'un phénomène marginal, mais on parle de l'approvisionnement en énergie de tout un pays industrialisé.
Pendant ce temps, EdF joue la carte politique. Chaque année d’exploitation du parc nucléaire en France remplit les caisses d'EdF et pour que l'état français n'ait pas la mauvaise idée en tant qu'actionnaire principal, de dicter la politique de l'entreprise, EdF signe tous les ans un chèque de 2 milliards d’euros pour le budget de Bernard Cazeneuve. Alors, on les laisse faire et on regarde les autres pays emprunter le chemin vers une politique énergétique raisonnable et durable.
Il est un fait que les ressources en carburants fossiles s’épuisent actuellement. Il est aussi clair que les 58 centrales nucléaires françaises ne pourront pas tourner éternellement, au risque de vivre des catastrophes à la Fukushima ou Tchernobyl en France. La question des énergies renouvelables n’est donc plus du tout une question idéologique, mais une question de la survie d’une société industrialisée.
Mais les intérêts de l'entreprise EdF semblent prévaloir sur l’intérêt des Français de pouvoir consommer aussi demain, de l’énergie à un prix abordable. La politique française, pour permettre à EdF de réaliser des bénéfices à court terme, accepte donc de se faire décrocher dans le domaine des énergies renouvelables. Pourtant, l’expérience allemande prouve plusieurs choses. A) la transition énergétique est possible. B) Le nucléaire comme «crédo d’état» est un anachronisme qui sert uniquement les intérêts des actionnaires d'EdF et C) seule une transition énergétique sérieuse pourra assurer aux générations futures l’accès à l’énergie à un prix supportable.
Pourtant, le Président Hollande avait basé une partie de sa campagne électorale sur cette transition énergétique qui actuellement en France, n’a tout simplement pas lieu. Dans quelques années, lorsque le parc nucléaire français devra être fermé, les Français payeront le prix fort pour les omissions politiques d’aujourd’hui.
(Kai Littmann) –