Après son expulsion illégale, nouvelle arrestation d’un journaliste allemand
- 23 août 2019
- Par Kai Littmann
- Édition : Eurojournalist(e)
La liberté de la presse connaît ses limites. Comme celle-ci. © Rainerzufall / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int
Le député Andrej Hunko avait soumis une question écrite au gouvernement pour savoir si cette arrestation s’était faite sur la base de ce fichier qui, lui, est fortement contesté, car il ne contient pas seulement les données privées de personnes qui se sont fait remarquer pour des infractions, mais également de personnes figurant dans leurs contacts, comme par exemple – des journalistes. La réponse du gouvernement allemand à la question du député était simple. « Oui ! Et les services français peuvent exploiter ce fichier jusqu’au 15 septembre » – comme si les services français allaient effacer ce fichier après cette date…
Pour le député Andrej Hunko, la mise à disposition de ce fichier constitue un scandale : « Les services secrets allemands échangent donc des données avec la France et créent une situation où, dans le cadre du sommet G7, des personnes sont poursuivies uniquement à cause de leurs opinions politiques. »
Ce qui est particulièrement perfide, c’est qu’au moment où les garde-frontières français avaient permis à Lukas S. de revenir en France, une nouvelle instruction du ministère de l’Intérieur le menaçait déjà de trois ans de prison « s’il entrait sur le territoire français avant la fin du sommet G7 et celle du sommet alternatif à Hendaye ». En clair – les autorités françaises l’ont laissé entrer en France dans l’unique but de pouvoir l’arrêter à nouveau. A croire que le jugement du Tribunal Administratif de Paris ne pèse pas lourd face à l’ intention des autorités de poursuivre tous ceux qui défendent d’autres positions que le gouvernement.
Les autorités françaises, elles, ont désigné cette nouvelle arrestation comme une « mesure administrative », ce qui est désormais possible dans le cadre de la nouvelle « loi anti-casseurs » qui permet la suppression de toute expression non souhaitée par le pouvoir en place. Maintenant, les autorités françaises évaluent la possibilité d’expulser Lukas S. à nouveau, et on prend les paris que cette « évaluation » durera le temps du sommet G7 à Biarritz. Autre option – Lukas S. risque d’être tout simplement incarcéré, puisque l’instruction du ministère de l’Intérieur, dont on n’a pas communiqué le contenu à Lukas S., le menaçait déjà de trois ans de prison.
Il est ahurissant de constater que la coopération franco-allemande bat de l’aile lorsqu’il s’agit de mener une politique POUR les citoyens et citoyennes, mais qu’elle fonctionne parfaitement lorsqu’il s’agit de faire taire des personnes qui expriment des opinions politiques qui dérangent autant en France qu’en Allemagne.
Mise à jour, vendredi 15h00 - Lukas S. a été à nouveau expulsé et cette fois, renvoyé en Allemagne par avion. En début de semaine, nous attendons les explications des autorités françaises. Mais au moins, il n'est plus incarcéré !
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