« - Vous avez votre pass ? » Me demande le milicien.
Je lui sors mon papier et il m’autorise à passer au supermarché.
Cela fait maintenant un peu moins d’un an que le confinement est terminé.
Le coronavirus a été une aubaine pour les puissants, ce qui, à l’habitude, n’aurait pu être toléré, est maintenant instauré. Le nouveau monde est là, et il est austère. Comment en est-on arrivé là ? Grâce à notre passivité et grâce au chaos instrumentalisé par l’État : bagarres en supermarchés, braquages, émeutes, meurtres et représailles ont fleuri à l’arrivée de l’été dernier. L’abus de pouvoir des forces de l’ordre avait amenés à ces actes, tout en se proclamant victimes.
Tout est question de point de vue.
Un tour majestueux a été joué au moment de l’essor du coronavirus, nous vivions désormais dans un mélange d’autoritarisme néolibéral se cachant derrière des valeurs républicaines et démocratiques. L’armée est toujours là, elle nous contrôle, nous surveille et est accompagnée des milices embauchées par le ministère des armées. La police elle, est pire, car elle se substitue peu à peu du joug du gouvernement, se rangeant du côté de notre dangereuse extrême droite.
Résilience : les chefs d’État vomissent ce mot prétextant un nouveau départ. Le rêve absolu d’un monde droit, propre et net ; un monde contrôlé. Toujours cette obsession du contrôle au détriment de toutes libertés et de hasards.
Mais « La Belle France » est divisée, plus que jamais. Tout le monde se hait.
Les conditions de travail sont encore plus déplorables, la privatisation fait son bonhomme de chemin et les pauvres meurent. Tout ça laissant place à un futur incertain qui profitera certainement au Rassemblement National.
La guerre civile est pour l’instant, froide. Lorsque que tout éclatera, les banques et les entreprises sauront en tirer profit.
Mes méditations devant le rayon de PQ furent interrompues :
« - J’étais là avant ! » Le mec venait de foutre une tarte à la dame qui voulait prendre le dernier paquet. Je passe à la caisse payant à l’automate. En sortant, je ne peux donner qu’un bout de pain à la dizaine de mendiants assis dehors. Le liquide est prohibé.
17 h 00. Une heure avant le couvre-feu, je rentre.
« Tu as trouvé ce qu’il te fallait ?
- Il n’y avait plus de PQ.
- Ce n'est pas grave, le journal, je m’y habitue. Il y a plus grave, Farid s’est fait chopper par les flics, il doit se faire passer un savon.
- Merde. On ne peut pas le sortir, il faut qu’on attende, en espérant qu’il en sorte. »
On avait accepté l’atteinte à nos libertés, on s'était plié à tout abus de pouvoir. La raison du plus fort est toujours la meilleure hein ?
Aujourd’hui pour moi, elle ne l’est pas, pour nous, il faut se battre, mais n’est-il pas déjà trop tard ?
Et puis, contre qui devons-nous nous révolter ?
Warrah