Billet de blog 21 févr. 2023

MarkLeeHunter1
Journaliste, écrivain et chercheur.
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La Convention citoyenne vote en faveur de l’aide active à mourir pour les mineurs

La phase de délibération de la Convention s’est close sur un vote sur les grandes orientations à propos de l’aide active à mourir. Ils sont 75% à y être favorables, et la majorité d’entre eux souhaitent l’ouvrir à la fois aux patients majeurs et mineurs. C’est la première fois que les 184 citoyens se positionnent sur l’un des points sensibles de cette question.

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Tout le travail de cette phase de délibération consistait à répondre à la question d’Elisabeth Borne, posée à l’ouverture de la Convention : “Le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ?”. Les 167 citoyens ayant répondu étaient 84% à estimer qu’il ne l’était pas. Et 75% d’entre eux pensent que ce cadre devrait inclure l’aide active à mourir.

Reste à savoir comment l’encadrer. Sous quelle forme, pour qui et avec quelles précautions. Ils sont 66% à être favorables à l’euthanasie, dont 67% souhaitent l’ouvrir à la fois pour les majeurs et les mineurs. Parmi les 72% favorables au suicide assisté, 56% englobent les mineurs.

Les enfants en fin de vie sont l’une des questions épineuses à laquelle il est demandé à la Convention de réfléchir. Elle a la charge lourde d’être la première à s’exprimer sur de tels sujets. “Le CCNE a dit “jokersur la question”, a rappelé l’un des citoyens durant leurs travaux de groupe, en référence à l’Avis 139 sur les questions éthiques relatives aux situations de fin de vie, publié en septembre dernier. Précisément, le Comité consultatif national d’éthique a rapporté être “conscient [...] de n’avoir pas traité certaines questions complexes. Celles-ci devront faire l’objet de réflexions ultérieures”. Le voilà servi.

Des arguments en faveur de l’aide active à mourir pour les mineurs

Certains citoyens n’en font pourtant pas une problématique. “Il faut pas oublier qu’un cancer pédiatrique, c’est un cancer [...] pourquoi on pourrait satisfaire une demande d’un adulte et pas celle d’un enfant, alors que la douleur, le parcours, les soignants sont les mêmes ?”, a tranché Corinne, une conventionnée, lors de leur débat en assemblée.

La difficulté, c’est le doute sur la capacité de discernement d’un enfant. Serait-il capable de prendre la mesure d’un tel acte ? Le Conseil économique social et environnemental, organisateur de l’événement, a justement mis, à disposition des citoyens, des experts capables de répondre à certains points techniques. Ainsi, le conventionné Marc-Olivier a rapporté que les enfants, “selon un des médecins qu’on a pu consulter, peuvent avoir un discernement qui peut être juste”. Problème résolu, pour ceux qui peuvent l’avoir.

Une réserve stratégique

On observe pourtant une réserve parmi les partisans de l’aide active à mourir. La majorité de ceux qui y incluent les enfants est moins large. Pour certains, c’est un choix stratégique. “On peut supposer qu’il y ait des oppositions en France à l’élargissement de la loi. Est-ce raisonnable de donner la place à l’opposition en ouvrant directement l’aide active à mourir pour les mineurs ?”, s’est demandé l’un d’entre eux pendant leurs travaux de réflexion en groupe. Un autre a renchéri : “Il ne faudrait pas que ce point-là mette en cause nos travaux alors qu’il est très minoritaire”. En Belgique, la loi de 2002 a été élargie aux enfants en 2014. Elle ne compte en effet que quatre cas. 

Cette position est également partagée par le président de l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD), a confié l’un des citoyens qui a planché sur le sujet. “J’en ai parlé avec Jonathan Denis, il m’a dit : ‘si dans un premier temps vous voulez faire évoluer la loi, évitez les mineurs’ ”. L’ADMD confirme ses propos. « L’idée, c’est d’apprendre avec une nouvelle loi », explique Philippe Lohéac, directeur général de l’association. Et avec ces apprentissages, penser un éventuel élargissement de la loi.

Pour l’heure, les jeux sont faits. Les citoyens devront encore déterminer la place des parents dans la décision, un autre sujet de dissensus. Il leur reste encore trois week-ends d’harmonisation pour se mettre d’accord sur un cadre à proposer au Parlement.

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