
Alors que l’Espagne détient le monopole des corridas, l’Italie des combats de coq, la Turquie propose ses festivals de lutte de chameaux. Chaque année, le troisième week-end de janvier, se déroule sa plus grande manifestation à Selçuk. Dans cette petite ville située à quelques kilomètres de l’antique Ephèse dans l’ouest de la Turquie, près de dix mille habitués ou spectateurs curieux se réunissent à l’occasion d’une tradition qui se perpétue depuis plus de cent ans.
Une compétition de lutte dans les règles avec un jury vigilant et des paris à la clé. Pour Emmanuel, "globe-trotter" suisse, qui a pris le temps de faire étape pour l’occasion, cet évènement reste malgré tout « très comparable avec ce que l’on peut trouver chez nous pour ce qui est des combats domestiques, par exemple en Suisse, le petit plus c’est cette musique que l’on a en arrière plan et qui est assez lancinante, entêtante, et qui va finir par nous rentrer dans la tête ».
La lutte de chameaux tient en réalité plus d’une comédie que d’un véritable sport qui plaira à toute la famille par son absence de sang ni de véritable violence. Le vrai spectacle tient dans la parade de ces animaux si caractéristiques, dressés et alimentés pour s’affronter. Rares sont les prises de lutte véritables, ni les charges de ces animaux d’une tonne sur le public, les festivités ont davantage lieu dans les tribunes. La grande majorité des spectateurs sont surtout là pour l’ambiance festive au son des innombrables tambours et autres flûtes traditionnelles. Un « moment de rencontres et de convivialité qui se transmet de père en fils » pour Mehmet, un propriétaire de chameaux peu stressé par la compétition. Le partage aussi fréquent des centaines de barbecues qui apportent leur fumée au paysage déjà surprenant de l’arène spécialement mise en place pour l’occasion. « Je pense qu’ils viennent là surtout pour l’ambiance, ceux qui sont intéressés par les chameaux sont plutôt en bas, j’ai rarement entendu de grosses clameurs sur des combats » estime pour sa part Emmanuel.
D’abord limités à la région Egée, les luttes de chameaux se sont également répandues en Anatolie. Un championnat existe même dans la région Egée avec pas moins d’une quinzaine de dates. Les combats ont lieu en hiver durant la période d’accouplement des chameaux, celle de moindre activité pour les agriculteurs. Excités par une femelle, les chameaux montrent d’impressionnants filets de bave avant d’aller combattre pour leur promise. Plus d’une centaine de chameaux est ainsi chaque année présentée au public. Chaque animal a son petit nom, parfois très célèbre, l’un d’entre eux s’appelle ainsi Nicolas Sarkozy, ni plus, ni moins…
Adrien Godet