Adoptée par le Parlement le 28 septembre 2009, la loi Carle impose les communes une dépense nouvelle : le versement d’une somme forfaitaire pour chaque enfant inscrit dans une école élémentaire privée en dehors du territoire de la commune.
L’organisation de « l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'Etat ». Ce principe est inscrit dans le préambule de la Constitution. Pour ce qui est des écoles publiques, ce sont les communes qui assurent leur financement, depuis la loi Guizot de 1833 puis les lois Ferry-Goblet de 1882-1886. Lorsque, sous conditions définies, des élèves ne peuvent pas être scolarisés dans leur commune de résidence, celle-ci, si elle donne son accord, indemnise la commune d’accueil. Parmi ces conditions restrictives : l’absence d’école publique ou de places sur le territoire de la commune, des obligations professionnelles des parents, l’inscription antérieure d’un frère ou d’une sœur dans l’établissement scolaire ou des raisons médicales.
Les établissements d’enseignement privés fonctionnent sur la base d’initiatives privées et relèvent de la liberté d’enseignement. C’est le financement public de ce principe qui est contesté, en particulier la fameuse loi Debré. L’adoption de la Loi Carle, au terme d’un feuilleton politico-législatif complexe, pose à frais nouveau cette question et va même au-delà. Son intitulé est clair « Loi tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d’association lorsqu’elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence ». Elle introduit pour la première fois expressément la notion de « parité », pourtant contraire à la différence de nature, de missions et d’obligations, entre l’enseignement public et les établissements d’enseignement privés.
La loi Carle, modifiant l’article L. 442-5-1 du Code de l’Education, crée une nouvelle obligation de financement. On estime qu’environ 4/10 des élèves inscrits dans des établissements primaires privés sont scolarisés en dehors de leur commune de résidence, soient 400 000 enfants. On appelle « forfait communal » l’ensemble des dépenses de fonctionnement. Ce forfait communal est variable. Il se situe généralement dans une fourchette allant de 400 à 1800 euros par élève. Combien de familles vont-elles utiliser les dispositions de la loi Carle ? Même une petite commune rurale peut compter une dizaine d’élèves scolarisés dans le privé d’une commune voisine. Certaines ont d’ores et déjà reçu des factures de 7.000 euros émanant de l’école privée en question. Une somme non négligeable dans des budgets déjà serrés.
De plus, quand il s’agit de privé, le maire n’est donc pas autorisé à donner (ou à refuser) son accord ! Tout au plus pourra-t-il refuser quand il s’agit d’écoles maternelles ou d’écoles élémentaires sous contrat simple. La loi Carle crée de fait l’équivalent d’un « chèque éducation » à la disposition des usagers. L’individualisation du rapport à l’école accompagne la dé-institutionnalisation de celle-ci. Outre les –importantes- questions financières, il apparaît que nous entrons ainsi dans une logique marchande, opposée à celle de l’Ecole de la République.