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Billet de blog 16 juillet 2012

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Blasphème pas mort !

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A la stupeur générale, trois jeunes femmes membres du groupe punk russe « Pussy riot » sont accusées de « blasphème ». Elles avaient dansé contre Poutine dans une cathédrale de Moscou.

C’est jeudi dernier, le 12 juillet, que le parquet de Moscou a inculpé les trois membres de « Pussy riot ». Elles s’étaient manifestées par une protestation originale : une danse dans un lieu inhabituel : le chœur de la cathédrale du Christ-Sauveur. Elles sont en détention préventive depuis le 3 mars. Leur procès doit débuter le 20 juillet. Elles sont accusées d’avoir « causé des dommages considérables aux valeurs sacrées du culte chrétien, attenté au mystère sacramentel de l'église et, refusant de répondre aux appels d'une employée de l'église de stopper ce sacrilège, sont entrées illégalement dans la partie clôturée de la basilique, destinée à effectuer les rites sacrés religieux. Par cela, elles ont humilié, d'une manière blasphématoire, les fondements séculaires de l'Église orthodoxe russe». Elles risquent jusqu'à sept ans de prison. Une pétition de soutien vient d’être lancée.

Le blasphème n’est pas un crime

De manière plus générale, une mobilisation contre les lois de répression de prétendus « blasphèmes » s’affirme. Elle fait suite aux tentatives des pays membres de l’Organisation de la Conférence Islamique (OCI) visant à faire promulguer par l’ONU une résolution sur la « diffamation des religions ». Un site dédié a été créé au Canada. Il pose des fondements théoriques clairs à la défense de la liberté d’expression :

Les lois anti-blasphème ont des défauts implicites qui entraînent souvent des abus de droits humains. Une définition claire et cohérente du blasphème y est inévitablement absente, laissant ainsi une énorme marge de manœuvre aux procureurs, aux juges et aux accusateurs qui sont souvent motivés par des intérêts politiques ou personnels. D'ailleurs, il y a une variété considérable de différentes peines imposées par ces lois car, contrairement aux autres crimes, les victimes du blasphème et les dommages qu'il causerait sont incertains ou intangibles ; les actions proscrites par les lois anti-blasphème peuvent êtres jugées des offenses mineures contre les sentiments d'individus, ou des injures contre les croyances d'une communauté entière, ou bien des atteintes sérieuses à une déité. Ces faiblesses font que les lois anti-blasphème sont souvent appliquées de façon sélective, arbitraire ou discriminatoire, ce qui aggrave les problèmes déjà existant dans les pays dont les institutions sont fragiles, et entache la réputation en matière de droits humains des démocraties normalement robustes. De toute manière, peu importe le contexte politique, les lois anti-blasphème prêtent à des autorités religieuses particulières le pouvoir de l'État et favorisent ainsi l'extrémisme, car ce sont généralement les éléments les plus conservateurs et intransigeants d'une communauté religieuse qui s'offensent le plus et sont les premiers à s'arroger le manteau de l'orthodoxie. Tiré de "Policing Belief: The Impact of Blasphemy Laws on Human Rights" par Jo-Anne Prud’homme, édité par Freedom House

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