Charles Conte (avatar)

Charles Conte

Abonné·e de Mediapart

Billet publié dans

Édition

Laïcité

Suivi par 271 abonnés

Billet de blog 29 mars 2019

Charles Conte (avatar)

Charles Conte

Chargé de mission à la Ligue de l'enseignement

Abonné·e de Mediapart

Actualités laïques

Les DDEN en Alsace et en Moselle; Humanists International: un nouveau nom pour l'ONG des organisations laïques; le dîner du CRIF; rencontre autour de la collection "Débats laïques" (L'Harmattan); un film sur le Chevalier de La Barre et la liberté de penser; "L'Autre": un album marie laïcité et poésie...

Charles Conte (avatar)

Charles Conte

Chargé de mission à la Ligue de l'enseignement

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

CALENDRIER

9 janvier Des DDEN en Alsace et en Moselle

Des Délégués Départementaux de l’Education Nationale (DDEN) pourront désormais remplir leurs missions dans les départements de Moselle, du Haut-Rhin et du Bas-Rhin.  La directrice adjointe du cabinet du ministre de l’Education national l’a confirmé lors d’une audience le 9 janvier. Cette victoire couronne une longue bataille. Eddy Khaldi, président de la Fédération des DDEN, la rappelle dans un article de « Le délégué ». Depuis la loi Falloux de 1850 des délégués cantonaux (lointains successeurs des «magistrats aux mœurs » de 1793), désignés par des conseils académiques, surveillent les écoles publiques et privées de chaque canton de France. La Loi Goblet de 1886 remplace les conseils académiques par des conseils départementaux et donne une fonction laïque et républicaine aux délégués.  En 1924, les conseils départementaux d’Alsace et de Moselle sont supprimés. Un imbroglio de textes et d’interprétations s’ensuivent.

Les délégués départementaux de l’Éducation nationale (agissant sous cette dénomination depuis 1969) sont présents partout sauf dans les trois départements mentionnés. Sans qu’il y ait de relation avec le régime des cultes local. Depuis janvier 2018 les DDEN ont créé deux unions départementales et multiplient les interpellations auprès du ministère. Ils ont réussi à faire valoir qu’il n’existait aucune exception territoriale, et que la mise en place des DDEN ne demandait aucun texte législatif ou réglementaire nouveau.  Les DEEN sont désormais nommés, comme partout, par le directeur académique des services de l'Éducation nationale (DASEN). Deux journées de formation ont déjà eu lieu. Les DDEN peuvent enfin s’investir dans leurs missions (trop souvent méconnues) de contrôle, de vigilance et de proposition : inspection des locaux, sécurité dans et autour de l’école, surveillance des effectifs, restauration, transport,  périscolaire, caisse des écoles…

« Le délégué de l’Education nationale » Publication de la FDDEN n° 258 Mars 2019

http://www.dden-fed.org/

 15 février L’IHEU devient Humanists International

L’International Humanist and Ethical Union (IHEU) rassemble 160 associations dans 70 pays. Elle était officiellement désignée en français comme « Union Internationale Humaniste et Laïque ». L’IHEU vient de décider de son changement de dénomination. La seule ONG défendant expressément la laïcité auprès de l’ONU se nomme désormais « Humanists International ». Il était difficile de dégager un consensus suffisant pour choisir un mot désignant l’ensemble de celles et ceux qui entendent vivre libres, hors de toute pression cléricale quelle qu’elle soit. Les vocables ne manquent pas : laïque, sans-dieu, païen, libre penseur, hérétique, séculariste, anticlérical, rationaliste, sceptique, adogmatique… et humaniste. C’est ce dernier mot qui a été choisi par les cinq associations qui ont fondé l’IHEU : American Ethical Union, American Humanist Association, British Ethical Union (aujourd’hui Humanists UK), Vienna Ethical Society et la Dutch Humanist league.  

Le congrès fondateur s’est déroulé à Amsterdam du 22 au 27 août 1952. Une motion, dite Déclaration d'Amsterdam, a été adoptée et mise à jour en 2002. Cette Déclaration précise notamment « L'Humanisme est le résultat d'une longue tradition de libre pensée qui a inspiré plusieurs grands penseurs et artistes du monde, et qui est également à l'origine de la science elle-même… L'Humanisme est une position éthique  qui affirme la valeur, la dignité et l'autonomie de l'individu ainsi que le droit de tout être humain à la plus grande liberté possible, dans la mesure où la liberté ne porte pas atteinte à droits des autres…. L'Humanisme soutient la nécessité de combiner la liberté personnelle avec la responsabilité sociale… L'Humanisme est une réponse aux demandes croissantes d'alternatives au dogmatisme religieux ».  Avec sa nouvelle dénomination,  Humanists International entend résumer et réaffirmer ces positions, en particulier en faveur de la séparation des Eglises et des Etats. Son président, âgé de 38 ans, est Andrew Copson. La Ligue française de l’enseignement est membre de Humanists international. 

https://humanists.international/

 20 février Dîner du CRIF

Le 20 février dernier, plus de mille personnes ont participé au 34° dîner du Conseil Représentatif des Institutions juives de France (CRIF). Il se déroulait au prestigieux Carrousel du Louvre. Etaient présentes nombre de personnalités : Emmanuel Macron, des ministres et des élus, une trentaine d'ambassadeurs, des représentants des cultes, des responsables associatifs, syndicaux, intellectuels, artistiques, économiques… Ainsi que les maires de Haïfa, Dakar, Chicago, Lisbonne, Sydney… Chacun payant un écot de 900 € (sauf quelques invités). Le Prix du CRIF a été décerné à Philippe Val. Le CRIF est moins ancien que le Consistoire, créé en 1808 par Napoléon Iᵉʳ, ou la LICRA, fondée en 1927 par Bernard Lecache, mais il est devenu la principale instance du monde politico-religieux juif en France. Il rassemble aujourd’hui une soixantaine d’associations.

Héritier du Comité général de défense juive organisé en 1943, le CRIF s’est imposé progressivement après-guerre comme un interlocuteur incontournable pour les pouvoirs publics. Il s’inspire de l’American Jewish Committee. L’Etat d’Israël est défini comme « l’expression privilégiée de l’être juif ». Samuel Ghiles-Meilhac, chercheur associé au Centre d’analyse et d’intervention sociologique (CADIS), a retracé son histoire dans « Le CRIF : de la Résistance juive à la tentation du lobby » (Robert Laffont, 2011). Et il détaille celle des dîners dans un article de la revue « Vingtième siècle ». Le premier a lieu en 1985, à l’initiative du président de l’époque, Théo Klein. Il réunissait une cinquantaine de convives dans un salon du Sénat autour de Laurent Fabius, alors premier ministre.

« Naissance et institutionnalisation de la soirée annuelle du Conseil représentatif des institutions juives de France », Samuel Ghiles-Meilhac, Revue XX° siècle n° 122

INITIATIVES

30 mars. Journée de rencontre autour de la collection Débats laïques

La collection « Débats laïques » a été fondée au sein des éditions L’Harmattan par Gérard Delfau. Agrégé de lettres classiques, ancien Maître de conférences à l’Université Paris VII - Diderot, sénateur de l’Hérault de 1980 à 2008, Gérard Delfau s’est toujours distingué par son attachement à la laïcité. Dans la dizaine de livres qu’il a publiés, les six derniers sont consacrés à ce sujet. Dont deux dans la collection qu’il dirige : « La Laïcité, défi du XXIe siècle » en 2015, et « L'invention de la Liberté de conscience ou l'entrée dans la modernité » (avec cinq co-auteurs) en 2017. « Débats laïques » propose six autres ouvrages dont l’intitulé est révélateur : « Vous avez dit concordat ? » de Michel Seelig, président du Cercle Jean Macé ; « Citoyen d’abord, croyant peut être, laïques toujours » coordonné par Monique Cabotte-Carillon, présidente de l’association CEDEC (Chrétiens pour une Eglise Dégagée de l’Ecole Confessionnelle) ; « L’Ecole laïque en Alsace et en Moselle » de Jean-Marie Gillig, ancien inspecteur de l'Education nationale ; « La laïcité en question (s) » de Gérard Bouchet, ex enseignant en IUFM et auteurs de trois anthologies de textes sur la laïcité ; « L’après-midi sera courte », plaidoyer pour le droit à l'euthanasie de Nadia Geerts, militante républicaine et laïque en Belgique et « L’islam et la République laïque » de Michel Delmas, spécialiste d’études internationales.

La plupart de ces auteurs se retrouveront autour de Gérard Delfau et de Françoise Laborde, sénatrice de Haute-Garonne, présidente de l'association EGALE (Egalité, Laïcité, Europe) le 30 mars en matinée au Théâtre du Lucernaire à Paris. Tous les thèmes évoqués dans les livres seront traités. Le programme se conclura avec Laure Daussy, journaliste à Charlie Hebdo sur « Le retour des Anti-Lumières ». L’entrée est libre, mais le nombre de places est limité. Ce qui implique une inscription : Formulaire de confirmation de présence.

« Les trois vies du chevalier » Un film pour défendre et illustrer la liberté de penser.

Touche à tout dans le monde du cinéma, le réalisateur de ce documentaire, Dominique Dattola, est aussi acteur, monteur et producteur. Dans son documentaire, il s’appuie sur la vie du chevalier de La Barre pour traiter de la liberté induite par la laïcité jusqu’à nos jours. En 1766, le chevalier de La Barre est condamné par le présidial d'Abbeville pour « impiété, blasphèmes, sacrilèges exécrables et abominables ».  Il est devenu le symbole de l’oppression de la libre pensée. Agé de vingt ans, il fait partie d’un groupe de jeunes gens qui seraient passés devant une procession du Saint-Sacrement sans se découvrir. On les soupçonne d’avoir entonné des chansons quelque peu irréligieuses. Un crucifix aurait été entaillé. Bien que Louis XIV aie supprimé la peine de mort pour blasphème en 1666 et que le dossier soit particulièrement mince, le chevalier est condamné à faire amende honorable. Le 1er juillet 1766, il est torturé, puis décapité et brûlé avec un exemplaire du « Dictionnaire philosophique » de Voltaire trouvé en sa possession. Celui-ci s’investira pour prouver l’innocuité des faits reprochés au chevalier, protéger ses compagnons et lutter contre l’usage de la torture.

Comme le montre le documentaire, la figure du chevalier de La Barre, ses souffrances et son exécution, restent emblématiques pour les militants laïques. Les défenseurs de la liberté d’expression en matière religieuse refusent la notion même de délit de « blasphème ». Un rapport de Reporters sans frontières recense en 2013 des lois contre le blasphème, ou contre des délits ou crimes analogues, dans la moitié des pays du monde. Ce qui démontre l’actualité de ce combat. Le rapport annuel de Humanists International (ex IHEU) s’investit pour ce combat. Le documentaire de Dominique Dattola est un outil unique et précieux dans ce cadre. Son réalisateur l’a conçu pour alimenter avec force et vigueur des débats citoyens. Il décrypte ainsi pas à pas l’histoire depuis le sacre de Louis XV en 1722 jusqu’en 2005 à l’occasion du centenaire de la loi de séparation des Eglises et de l’état. Un dossier pédagogique accompagne l’œuvre, en ligne sur un site qui présente les modalités pour organiser les projections et les débats…

www.les3viesduchevalier.org

 PUBLICATIONS

L’Autre, de Christine Beigel et Carole Chaix

Cet ouvrage inclassable se présente comme « un dialogue poétique et coloré pour la laïcité ». C’est un indéniable tour de force que de marier la poésie, l’affectivité, avec un principe juridique et politique comme la laïcité. Cynthia Fleury, avec son article « Laïcité chérie », et Henri Pena-Ruiz, avec son « Dictionnaire amoureux de la laïcité », s’y sont essayé avec bonheur. Nos deux auteures également. Et nous voici devant un bel objet. Un album singulier, dont les soixante pages accueillent des phrases et des dessins à la fois simples et foisonnants. Et qui respectent pourtant l’ordre d’un abécédaire ! Plutôt que de paraphraser, donnons-en des fragments, dus à Christine Beigel : « Ça s’est passé comme ça : j’ai regardé à gauche pour traverser. Et il était là, au coin de la rue. L’Autre… Je lui demande de me parler de ses racines, d’où il vient. On vient tous de quelque part… Cet instant, j’aimerai qu’il dure une éternité… Je lui propose de faire un truc : il laisse sa religion à la maison, et moi, mes stupides grimaces… J’espère qu’il trouvera son chemin dans les courants d’air… Je pense à vol d’oiseau… ». Les dessins de Carole Chaix font vivre les couleurs au travers d’illustrations pleine d’imagination. Les plus originales  représentent des métiers de rêve : conducteur de tapis volant, charmeur de monstres, annonceurs de bonnes nouvelles, coiffeur de mammouths, faiseur de beau temps… Ce bel ouvrage est publié par les Editions du Pourquoi pas. Une association née en 2012, mariant la Ligue de l’Enseignement des Vosges et le site d’Épinal de l’École Supérieure d’Art de Lorraine.  Son site regorge de merveilles… non réservées aux enfants.

« L’Autre » Christine Beigel et Carole Chaix. Editions du Pourquoi pas.

https://www.editionsdupourquoipas.com/

Illustration 1

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.