Billet de blog 29 janvier 2012

sarahorchani

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La Tunisie que j'ai rencontrée

sarahorchani

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Salle archi comble au théâtre municipal de Tunis pour écouter un Bourguiba confiant son vécu à sa fille et au garde chargée de sa résidence surveillée. "Bourguiba, sa dernière prison" de Raja Farhat nous livre le témoignage d'un destin historique. Au moment où le personnage de Bourguiba évoque le livre de Tahar Haddad sur les droits des femmes écrits dans les années 30; applaudissement du public.
La Tunisie que j'ai rencontrée est attachée à son Histoire. La pays d'Ibn Khaldoun, père de la sociologie, ne veut pas se faire imposer une culture avec des références étrangères à sa tradition réformiste progressiste.
C'est lundi soir, un jour avant le dernier jour de Hannouka.  A l'entrée du restaurant Mamie Lili au coeur de la Goulette, un sapin de Noël et un chandelier de Hannouka illuminent l'entrée du restaurant Mamie Lili.  Beignet saupoudré au sucre glace, tarte au pomme vous sont servis. Têtes couvert d'un foulard ou d'une kippa ou non-couvert se côtoient dans une ambiance joyeuse et chaleureuse et fêtent ensemble la mise en ligne du site internet Dar El Khekra dédié à l'Histoire des Juifs de Tunisie. (http://www.dar-eldhekra.com/) La Tunisie que j'ai rencontrée est attachée à sa diversité culturelle, transforme les différences en richesses à partager. Ce mercredi matin , à la veille de mon départ, je rejoins les étudiants et professeurs qui sont allés scander sous les fenêtres du ministère de l'enseignement supérieur leur refus de voir les salafistes imposer leurs lois à l'université. A ce moment là, les salafistes occupent la Faculté de la Manouba pour imposer l'inscription des femmes en niqab et des cours non-mixtes.  "Le savoir passe par le regard". En réponse à l'obscurantisme, des pancartes louaient le savoir et l'éducation. Beaucoup de ces porteurs de pancartes sont des femmes, conscientes du rôle central de l'éducation dans l'émancipation des esprits et dans le développement du pays. La Tunisie que j'ai rencontrée a un amour pour le savoir et pour l'éducation. Elle sait qu'elle doit son présent à la priorité donnée à l'éducation juste après l'indépendance.  Dans les rues, les magasins, la politique est dans toute la discussion. Une vendeuse d'habit au fil d'un échange avec moi affirme que jamais elle portera le voile.  A l'heure de la réécriture de la Constitution, toute la société tunisienne est en mouvement: professeurs, journalistes, artistes,policiers,syndicalistes, ouvriers ect.  Il existe une crainte de voir s'échapper les libertés si chèrement conquises. Certains relèvent dans le discours d'Ennahdha le leitmotiv "Pour le moment".  Ma belle Tunisie, quelle belle leçon de citoyenneté donnes-tu..Je n'ai jamais vu la combativité de la société civile tunisienne baisser les bras. Toujours en mode de vigilance. A chaque acte obscurantiste, à chaque mot de travers, il n'y a jamais eu de silence. Et tous ces gens qui consacrent leur temps à reconstruire une Tunisie libre et juste. Quand ils ne travaillent pas, ils manifestent, quand ils ne manifestent pas, ils lancent des manifestations, quand ils ne lancent pas de manifestations, ils écrivent des articles pour dénoncer les comportements dangereux et liberticides en appellant à une Tunisie progressiste. Une conscience citoyenne lumineuse qui fait battre le coeur à tous les épris de la liberté et de la justice sociale, la vie de la cité prise en main par le peuple, c'est ce qui s'appelle la démocratie..
 

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