A quelques heures de la clôture de la dernière semaine de négociations sur le climat, Ronan Dantec, porte-parole Climat de Cités et gouvernements locaux unis (CGLU), témoigne depuis depuis Tianjin (Chine) de la difficulté d'avancer.
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«Les délégations nationales ont décidé d'affronter les sujets difficiles.» Prononcée en fin de semaine à Tianjin, cette phrase de Christiana Figueres, qui a remplacé Yvo de Boer comme nouvelle Secrétaire générale de la CNUCC, a le charme des discours diplomatiques onusiens... Elle vaut reconnaissance des blocages de la négociation sur le climat, qui se sont affichés ce vendredi soir lors d'une plénière informelle sur l'avenir du protocole de Kyoto.
Dernière étape avant Cancun, la semaine chinoise aura été fort décevante. Ceux qui espéraient que le déplacement à Tianjin de 3.000 délégués du monde entier se traduirait par un assouplissement de la position chinoise en sont pour leurs frais. «Nous agissons mais laissez-nous faire à notre rythme»: le discours sur le climat ne varie pas et, non sans raison, les négociateurs chinois ont beau jeu de rappeler la faiblesse des engagements américains, après l'échec de la présentation de la «loi climat» de l'administration Obama au Congrès, pour justifier leur propre absence d'engagement.
Ainsi, le vif incident qui a encore opposé, en réunion de négociation, Américains et Chinois, ici à Tianjin, a le parfum des disputes de vieux couple, quand aucun des deux partenaires ne veut changer ses habitudes. Dans le monde d'interdépendance économique et financière qui est le leur, les deux grandes puissances savent qu'elles vont continuer de vivre ensemble, et la négociation ne bougera réellement qu'au rythme de leurs accords de vie commune.
Ainsi, dans l'angoissant brouillard industriel permanent de Tianjin, peu de lueurs d'espoirs percent. Si la grande majorité des négociateurs semblaient convaincus, dès le printemps à Bonn, que le sauvetage de la négociation multilatérale passait par la conclusion d'accords concrets à Cancun, sans tenter d'en faire une revanche de Copenhague, ceux-ci tardent à se dessiner.
Trop de divergences sur les sujets difficiles (les engagements de réduction des émissions, les systèmes de vérification, les niveaux de financement...) nuisent à la conclusion des accords sur les points qui semblaient suffisamment avancés (la déforestation, l'adaptation, l'architecture du mécanisme financier...). De plus, certains pays, autour des pays producteurs de pétrole comme l'Arabie Saoudite, ne ratent pas une occasion de ralentir les négociations par leurs obstructions : des manœuvres dilatoires pourtant fermement dénoncées par Christina Figueres lors de son discours introductif.
Il devrait néanmoins y avoir un certain nombre de décisions de la conférence des Parties à Cancun, la communauté internationale ne pouvant se permettre la mise en scène, après Copenhague, de sa totale impuissance. Pour une part, les décisions de Cancun porteront sur les méthodes de travail pour des accords sectoriels opérationnels en Afrique du Sud en 2011 : le minimum pour sauver un processus multilatéral qui reste néanmoins nécessaire.
La stratégie des réseaux de collectivités locales, que je représente ici, sera d'ailleurs de s'intégrer dans ces nouveaux lieux de décision, où se forgeront les outils financiers dont nous avons besoin pour renforcer notre propre action, en particulier dans les villes du Sud.
Quant à l'accord légalement contraignant permettant de baisser les émissions de gaz à effet de serre à la hauteur des enjeux fixés par la communauté scientifique, il attendra des jours meilleurs. Dans un monde de crises, monétaire et économique, qui est le nôtre, le climat n'est qu'une rentabilité parmi d'autres, les crises ne pouvant se régler que dans la même dynamique. La négociation concentre les antagonismes sur les modèles de développement nationaux, tout en affirmant l'absolue nécessité de la régulation internationale: c'est sa fragilité constitutive... mais aussi sa force pour participer à ce nécessaire accord planétaire global.