Orphée, aux Editions de la Différence, est une « collection de poésie au format de poche, bilingue pour les textes étrangers, dont la parution est suspendue pour le moment »…
Au hasard, comme en maraude, ces petits volumes, à la couverture grise ou jaune, se dénichent désormais à l’éventaire des soldeurs… Et certains titres, sans équivalents ailleurs (ainsi une traduction des poèmes du russe Bounine, de l’italienne Lalla Romano ou du kabyle Si Mohand) s’avèrent d’ores et déjà introuvables. Il faut donc se précipiter…
D’abord, saluons, Claude-Michel Cluny, maître d’œuvre de l’entreprise éditoriale, lui-même écrivain princier : entre autres le recueil Inconnu passager, chez Gallimard, un classique de la poésie contemporaine - ou ce roman d’initiation : Un jeune homme de Venise, folio 1460 - ou les 6 premiers tomes de son journal, L’invention du temps…
Car le défi est d’envergure… Rien d’autre que la poésie universelle de toutes les époques ! Et sous ses formes rares : pantoums malais ou prières de Grégoire de Narek, par exemple. Tout comme ces poètes de pure désuétude (Henry Bataille, dont Aragon se disait l’ultime lecteur ; Rémy de Gourmont, présenté pourtant par Michel Houellebecq en personne ; et Théodore de Banville, et Anna de Noailles, pour s’en tenir au domaine français), absents des anthologies actuelles, et qui revivent, peut-être une dernière fois, aux côtés de Keats, Horace, Corbière, Gongora, Rilke, Dante, Mallarmé…
Les Pléiades, chinoise, grecque, latine, portugaise, arabe ou anglo-saxonne, nous offrent leurs étoiles les plus lointaines, les plus secrètes…Parmi plus de 200 titres, ma sélection de cœur retiendrait : Epigrammes de Martial, version allègre de Dominique Noguez ; Précieux et libertins, le florilège réuni par Michel Nuridsany ; Elégies romaines de Goethe ; D’amour et de mort, poésies complètes de Jean de Sponde, présentées par James Sacré ; Les Tristes d’Ovide. ; Sur notre terre exilé de Li Bai ; La Liberté des feuilles de Jean-Philippe Salabreuil ; Pénultième de Vladimir Holan ; les Cent un quatrains d’Omar Khayyam …
Le mythe raconte que la tête d’Orphée, tranchée par les ménades, chantait toujours dans le courant du fleuve l’emportant… C’est, d’une certaine manière, cette voix indestructible qui se fait entendre contre les vents et marées de la sauvagerie marchande…