http://blogs.lesinrocks.com/poupaud/2010/08), vous y verrez unephoto de ces trois-là avec Géraldine Bajard à Locarno.
Vous pourrez certainement voir à Parisdans les prochains mois Han Jia (Vacances d’hiver), « lacomédie la plus lente de l’histoire du cinéma » comme l’a présentée OlivierPère, directeur du festival. Il y a du Jim Jarmusch chez le réalisateur LiHongqi, en plus grinçant peut-être. On rit jaune devant ces interminables plansfixes où errent des adolescents désœuvrés et quasi hors langage. Les adultes nesont guère plus bavards, témoin ce dîner en famille où l’on n’entend quel’aspiration très bruyante des nouilles ou les scènes tragi-comiques où grand-pèreet petit-fils passent des après-midi entiers devant la télévision.
Très éprouvant et passionnant est lereportage de Xu Xin sur la catastrophe de Karamay. En 1994, la salle des fêtesde Karamay fut le théâtre d’une épouvantable tragédie : plus de 700écoliers et leurs professeurs, soigneusement sélectionnés pour divertir unedélégation de cadres du parti et du gouvernement, étaient en pleinereprésentation lorsqu’un incendie se déclara. On ordonna aux élèves de resterassis pour faire sortir les hôtes de marque les premiers. Avant que l’incendiene soit contenu, 323 personnes avaient trouvé la mort, dont 288 enfants de 6 à14 ans. Tous les officiels sont survécu. Après la tragédie, l’histoire futcensurée dans les médias chinois. Xu Xin est allé à Karamay et a enregistré la parole des parents qui ont bien voulu témoigner, car beaucoup ontpeur des représailles. A ce jour, aucune enquête sur l’accident n’a été faitepar les autorités et les réclamations vives de certains parents ont été punies deprison. Le film dure près de six heures, six heures pendant lesquels lesparents racontent leur douleur, leur révolte devant tant de mépris desautorités. Ils ont été autorisés à avoir un autre enfant, un autre enfant à quiils n’ont rien raconté, pour le protéger, disent-ils. Ils savent que cesenfants connaissent la vérité mais, quand les enfants les interrogent, ils neleur répondent pas, ils n’en ont pas le courage : « Comment mon enfantpourra-t-il grandir si je lui dis que le Parti et que le gouvernement sontmauvais ? » explique l’une de ces mères inconsolables. La critique transpire dans chaque entretien : « Nous sommes tous coupables, nousavons été apathiques, tout le monde savait que ce bâtiment était dangereux, ques’il y avait un accident, ce serait un drame. Nous le savions et nous n’avonspas protesté. Nous n’avons rien dit. » « La sécurité est la première despriorités. Il y a trop d’accidents en Chine. Pourtant il n’y a rien de plusprécieux que la vie humaine. » Quand on a perdu un enfant, que risque-t-onde pire ? « Ils peuvent m’empêcher de parler mais ils ne m’empêcheront pasde le penser. »
Françoise Mona Besson