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On voit son nom partout. A la presse, au JT de 20h, à l'écoute de toutes les antennes de radio et évidemment sur l’ensemble des réseaux sociaux. Dieudonné, de son nom de scène, aura réussi, à la veille de sa nouvelle tournée, à créer un immense buzz médiatique. Accusé d’antisémitisme pour quelques blagues à l’encontre des Juifs, c’est surtout sa « quenelle » qui a fait sensation. Ce geste inventé par ses propres soins serait a priori cousin germain du salut nazi. La polémique d’interdiction de scène a enflammé les médias ces derniers jours et a certainement offert à Dieudonné la chance d’être le premier personnage médiatisé de l’année.
Ce 9 janvier 2014 aurait dû symboliser le début de la tournée de l’humoriste à Nantes éveillant la joie de son fidèle public. Le scénario est finalement bien différent que prévu. Suite aux différentes plaintes de certaines communautés juives se sentant agressés face aux attaques de Dieudonné, le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, a souhaité interdire le spectacle. Il a donc prié les différents préfets de faire preuve de fermeté pour que cette mesure soit bien respectée. Premier retournement de situation en début d’après-midi. Le tribunal administratif de Nantes annule la décision du ministre et affirme que le spectacle pourra bien avoir lieu. Puis, en début de soirée, nouveau coup de théâtre. Le Conseil d’Etat est saisi et décide finalement in extremis d’empêcher l’artiste de se produire. De quoi fortement énerver les cinq milliers de spectateurs patientant depuis plusieurs heures devant le Zénith de Nantes.
Cette interdiction a et fera encore polémique ces prochains jours. Certains parlent d’atteinte à la liberté d’expression, une des valeurs fondamentales de la République et de la démocratie. A raison ? Dieudonné connu pour ses blagues parfois très, très limites sur la communauté juive a pu en heurter plus d’un. Notamment ses références à la Shoah qui pourraient être aujourd’hui considérées comme des paroles antisémites. D’autant que son geste de la quenelle, dont la signification reste encore floue (de simple geste antisystème au signe nazi), se répend à une vitesse folle. Le net n'y est pas pour rien lorsque l'on découvre le nombre de photos avec la quenelle représentée dans n'importe quelle condition et par n'importe qui. Le ministre de l'Intérieur justifiera donc cette interdiction en expliquant qu' "on ne peut tolérer l'antisémitisme, le négationnisme et le racisme". Il approuvera la décision du Conseil d'Etat la qualifiant de "victoire pour la République". La condamnation de Dieudonné peut aujourd'hui paraître amplement justifiée aux yeux de certains, plus contestables pour d'autres. Ce qui peut être en revanche plus inquiétant, ce serait une reproduction ce phénomène. De là pourrait alors venir une remise en cause de la liberté d'expression.
Enfin, ce qui peut chamailler dans l’affaire Dieudonné… c’est l’affaire en elle-même ! Un peu tombé du ciel, Dieudonné est réapparu d’une
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manière à se demander si lui-même s’attendait à se retrouver avec une telle polémique sur le dos. On peut d’ailleurs se poser la question si le pouvoir ne cherche pas à trouver un bouc émissaire histoire de faire passer des réformes en douce. C’est d’ailleurs étonnant qu’on ne parle plus de la courbe du chômage qui devait s’inverser fin 2013. Tout laissait penser que les médias allaient en débattre pendant des mois. Au final, rien du tout, Dieudonné semble paraître la priorité… Les mauvaises langues évoqueront même que le buzz Dieudonné aura plus été provoqué par l’Etat et non pas par l’humoriste lui-même…
Le buzz Dieudonné semble loin d’être fini à l’heure d’aujourd’hui. Sa tournée sera-t-elle définitivement annulée ? Pas si sûr… L’humoriste compte déjà faire appel à la Cour Européenne des droits de l’Homme. Motif ? Remise en cause de la liberté d’expression. Histoire à suivre donc… Et concernant M. Valls, lutter contre l’antisémitisme pour protéger la religion juive est très juste. Mais réciproquement, pourquoi ne pas avoir condamné les Femen au printemps dernier ? N’attaquaient-elles pas elles non plus une religion ?
Pierre Lepelltier, lycée Albert Camus, Bois-Colombes.