Bref. On devait aller grimper sur une falaise avec le groupe d'escalade. A midi, on monte dans le car. On a hâte d'arriver. On voit des champs. On voit des villages. On voit des vaches. On se demande si on a définitivement quitté la civilisation.
On voit des vignes. On voit des affiches pour du Champagne. On voit des gens bourrés. On comprend qu'on est arrivés. Le bus roule toujours. Tout à coup, il s'arrête. Au milieu des vignes. Le chauffeur dit : « Vous descendez ! » Les élèves demandent « C'est une blague ? » Les profs disent : « Vous descendez ! » Les élèves descendent. On prend tout le matériel. C'est lourd. On commence à grimper une pente. C'est encore plus lourd. On essaye de pas écraser les grappes en montant. C'est dur. Une fois en haut, on entre dans la forêt. C'est boueux. Ça glisse. Tout le monde tombe. Après quinze minutes de marche, on voit qu'en fait on longe un chemin où il n'y a pas de boue. On descend sur le chemin. Là on voit quelqu'un avec une carte. En fait, la falaise est juste à l'opposé. On redescend jusqu'au car. Il essaye de tourner. Il est coincé au milieu des vignes. Tout à coup il se penche sur ses roues latérales. La prof crie : « Tous à gauche ! » Le bus se remet droit. Il arrive à se tourner et on part vers la falaise. On s'arrête au milieu d'un champ. On se rend compte qu'il est trop tard pour aller à la falaise.
On attend que le chauffeur fasse demi-tour. Sauf qu'il s'embourbe. Il patine. Il patine. Il patine. On va pousser. On le sort du trou : victoire ! Il prend de l'élan pour finir son demi-tour. Et il s'embourbe à nouveau. On soupire. On voit un paysan. On va lui demander des pelles. Il en a pas, mais il a des sapins. On met des sapins sous les roues du car. On se prend de la boue dans les yeux, dans les cheveux, sur les mains, et le chauffeur dit adieu à son costard. On pousse à nouveau. Le bus arrive à se dégager. On monte dedans, et, après trois secondes de trajet, on sent que les sièges tressautent. On se dit qu'on a crevé un pneu. Le chauffeur se dit qu'il va se suicider. Les profs se disent qu'on peut faire une croix sur les sorties. En fait on a pas crevé mais une pierre est coincée entre les pneus. Après avoir demandé à un mec de passage, à une fermière, aux flics et à un mécanicien, on arrive à enlever la pierre. Il est dix-huit heures, il reste deux heures de trajet, il va bientôt faire nuit et on a pas fait d'escalade.
Bref, on a fait une sortie falaise.
Barbaralice, Le P'tit Luther.