«Tutu», «fille», «classique», «homosexuel», «ballerine», «pointes», «ballet», «collants», «danses de salon»… tels sont les mots que l'on rencontre quand on demande aux gens ce qu'évoque la danse pour eux. En effet, dans les mentalités de la plupart des gens, la danse est représentée uniquement par le classique et associée aux femmes. Par Albane Paubert, Mathilde Ducro
Sandrine Dumerc est une passionnée de danse depuis ses 17 ans. Aujourd’hui, elle allie différents styles dans son association, 'Akadanse'. Elle a accepté de répondre à nos questions afin de mieux comprendre cet univers et ses stéréotypes.
Après avoir passé ses premières années en compétition de natation, Sandrine a commencé la danse avec le Modern Jazz, qui est devenu au fil du temps un mode d’expression corporel international. Son envie sportive a changé au cours de son adolescence, elle ne souhaitait plus «s’exprimer sportivement mais artistiquement». Ainsi, la danse est devenue sa nécessité intérieure.
Après 4 ou 5 ans de pratique, elle s'est orientée vers le Hip Hop : «la demande s’est faite ressentir dans les cours».
Une opportunité s’offrait à elle pour découvrir ce nouveau style culturel musical et artistique, apparu aux États-Unis en 1970, qui se caractérise par des figures au sol. Aujourd’hui, le Hip-Hop est considéré comme une danse «de rue», «d’hommes», et assignée à une classe sociale inférieure à celle qui correspondrait à la danse classique (parfois jusqu'à la stigmatisation). Cependant, on remarque que dans les cours de danse la majorité est largement féminine dans tous les styles. La pédagogue le confirme : «L’inégalité entre les hommes et les femmes existe depuis toujours dans le monde de la danse. L’arrivée du Hip Hop a cependant permis d’impliquer davantage les hommes.» Ainsi, chacun trouve sa place dans le style qui lui permet de s’épanouir artistiquement.
Le meilleur moyen de se construire est de vivre de sa passion. Sandrine a réussi. Mais, comme tous les parents qui s’inquiètent pour l’avenir de leur enfant (les métiers artistiques étant incertains financièrement et considérés comme des «métiers loisirs»), les parents de Sandrine auraient préféré qu’elle fût professeur d’éducation physique, ce métier étant plus simple et plus rassurant pour eux. Cette réaction est très courante et montre que les stéréotypes sont ancrés dans les mentalités depuis longtemps. Quand le bonheur des enfants est compris et accepté par les parents, ces mentalités ont la possibilité d'évoluer. Rendons grâce aux personnes qui œuvrent dans ce sens.
Malgré cette révolution silencieuse, la danse reste sous-estimée et l'effort physique qui la sous-tend n'est pas reconnu à sa juste mesure. Or celle-ci engage le corps autant qu'un véritable sport de haut niveau dans tous les styles qui l'incarnent. On connaît en plus des fondamentaux Hip Hop, Jazz et Classique, les danses de couples (salsa, tango, etc.) qui sont mises en avant par des émissions télé, la zumba, le ragga, le New style, les danses orientales, africaines… ainsi que le contemporain qui a fait une arrivée dérangeante. Dans ce registre, Anna Halprin (aujourd'hui âgée de 95 ans et toujours en activité) a bouleversé la vision de l'art en proposant une forme d’improvisation inédite basée sur les rituels du quotidien (s'habiller, se déshabiller, etc.). Elle a cassé les mouvements stéréotypés appris en cours. Elle est une grande artiste chorégraphique qui a marqué le monde de la danse et montré qu’une femme peut autant réussir qu’un homme dans les métiers de direction. Il est vrai que les hommes occupent généralement ces postes dits 'supérieurs' (comme la production, la mise en scène et la création), alors que les femmes sont confinées au périmètre de l'interprétation dansée.
Pour que ce monde avance, il faut que chacun(e) de nous s’implique dans le combat qui lui correspond. S'exprimer artistiquement avec la danse est aussi valable qu'une toute autre vocation. « La danse est une conversation entre le corps, le cœur, l’esprit et la musique. » (citation d'origine inconnue)
Albane Paubert,Mathilde Ducro, Pigeon 2 Poche, lycée Nord Bassin, Andernos